Dimanche 4 septembre, une quinzaine de personnes souffrant de BPCO, souvent à un stade avancé de la maladie, ont participé à une course de 46 km, organisée dans le cadre de l’épreuve cyclo-sportive “La Lucien Aimar” qui s’est déroulée près de Hyères, sur le massif des Maures. Ces sportifs amateurs ont ainsi démontré que cette maladie respiratoire handicapante ne les condamne en rien à l’immobilisme. Bien au contraire ! Et ils l’ont prouvé à Hyères.
C’est sur un parcours de 46 kms, de l’Aygade au massif des Maures en passant par La Londe en passant par le chemin des Pignes et la bosse des “Harkis” avant de rallier l’arrrivée, à Salins d’Hyères, que Philippe Poncet, malade BPCO en stade 4 avec à son actif deux records du monde sous assistance en oxygène, s’est engagé le 4 septembre dernier avec une quinzaine d’autres malades respiratoires venus de divers coins de France mais aussi de l’étranger. Cette participation hors norme visait à sensibiliser le grand public à cette pathologie encore trop méconnue, mais qui touche plus de 3 millions de personnes en France et cause plus de décès que ceux provoqués par la route, l’alcool et le sida réunis. Au-delà des défis personnels qu’elle supposait, cette course sycliste avait également pour objectif d’encourager les malades respiratoires à faire de l’exercice, en démontrant qu’il est possible de le faire même sous assistance respiratoire, c’est à dire en étant branché sur oxygène.
“La B.P.C.O -Broncho-Pneumopathie-Chronique-Obstructive- qui touche toutes les générations dès 30 ans est une maladie pulmonaire très invalidante sans faire pour autant l’objet d’un plan stratégique de prévention”, explique Phiilippe Poncet (photo, aux côtés de Lucien Aimar) qui, année après année, poursuit à la fois ses défis sportifs et son combat pour la reconnaissance et une meilleure prise en charge de cette pathologie.
Pour ce dernier, la ministre de la Santé “reste aphone devant ce fléau, sans raison, et démontre surtout un certain dédain pour ces patients sans souffle, totalement désocialisés et souffrant en silence de suffocation”. La veille de la course, samedi 3 septembre à 18h00, Lucien Aimar a reçu les honneurs de la ville d’Hyères et de son maire Jean-Pierre Giran, ainsi que son premier adjoint en charge des sports, Francis Roux pour le cinquantième anniversaire de sa victoire sur le Tour de France. Il était accompagné des jeunes sportifs Hyèrois et d’une cohorte d’anciens professionnels et champions cyclistes, dont Julio Jimenez, Raphaël Geminiani, Jen-François Bernard, Gianni Motta, Daniel Morelon, Christian Seznec …Tous venus encourager l’initiative de “La Lucien Aimar-o2&Cie-Le Souffle pour la Vie”, le matin même de l’épreuve sur le parvis de la mairie de La Londe,, où le premier magistrat de la ville, François de Canson, les a également accueilli et félicité pour leur engagement.
15 BPCO sur la ligne de départ
Parmi les coureurs qui se se sont présentés sur la ligne de départ, aux côtés des cyclistes amateurs et professionnels engagés sur des parcours de longueur variable (46 à 146 km), se trouvait Karen Skàlvoll (photo), Norvégienne, arrivée de Manchester, où elle participait le 14 août dernier à l’évènement concours du “World Strongest Man” – l’homme le plus fort du monde -. Elle y fut honoré d’une médaille d’argent ce qui en fait la 2ème femme la plus forte du monde. Membre de l’équipe mondiale d’o2&Cie, qui devrait se retrouver à Philadelphie l’an prochain, Karen est atteinte de déficit Alpha 1 (B.P.C.O-génétique), et a récemment obtenu la classification o2 qui englobe tout les déficients respiratoires. Elle a parcouru avec brio les 46 km de l’épreuve aux côtés de son compagnon qui portait sa bouteille d’oxygène.
A ses côtés, se trouvait John Cummings (photo), 50 ans,qui souffre de bronchectasie (DDB), diagnostiquée en 1990, et qui a rejoint La Londe avec sa famille, via Paris en provenance de Californie où il réside. Ce “challenger de la BPCO”, comme il aime se nommer sur son blog, en stade 3 de la maladie, a, entre autres épreuves sportives, participé au San Diego Xterra Sprint Triathlon en Californie. Soit une course au sein de laquelle on a du mal à imaginer un malade respiratoire. “J’encourage les personnes touchées par la BPCO à s’engager à être plus fort, plus maigre, plus heureux et plus capable de mener une vie qu’ils maîtriseront mieux”, confie celui qui s’est lancé dans des compétitions sportives dès 2002 autour de la baie de San Francisco. Il a depuis cette date participé à 8 manifestations sportives, courses à pied, triathlon et épreuves cyclistes. Il est psychothérapeute en cabinet individuel et par ailleurs conseiller dans le cadre d’un programme d’éducation qui vise à émliorer les opportunités d’emploi des étudiants diplômés.
Russel Winwood (photo à d.), autre malade BPCO a rejoint les coureurs de la Lucien Aimar. Né à Brisbane, en Australie, agé de 50 ans, il a été diagnostiqué comme asthmatique dans son plus jeune âge. Fumeur jusqu’à 36 ans, il subit un collapsus pulmonaire à Noël 2002. Il change alors son mode de vie du tout au tout et se met au sport. Les années suivantes, sur conseil d’un ami, il se mit au triathlon, sport auquel il s’adonna huit années durant. En 2011, il observe une baisse de ses capacités physiques et des difficultés respiratoires nouvelles. Des tests confirmeront une BPCO. “Mes voies respiratoires étaient devenues très étroites en raison d’années d’infections pulmonaires, provoquant une accumulation de tissu cicatriciel.” En mai 2012, 6 mois après son diagnostic, il se lance dans sa première nouvelle épreuve sportive. Russel a, parmi tous ses exploits, participé au dernier marathon de New-York et a entamé une importante préparation pour venir courir sur les 46 km du circuit étudié spécialement avec Lucien Aimar, vainqueur du Tour de France.
Des associations présentes sur l’épreuve
Pour la France, des associations membres de la FFAAIR se sont fortement engagées à Hyères. Huit personnes de l’AAIRN sont ainsi venues de Rouen, mobilisées par Patricia Louvel (photo), la présidente de l’association. Le doyen de son équipe, Jacques Leblond (à g. sur la photo) (80 ans), était sur l’épreuve des 20 km, ainsi que Thierry Paquet (53 ans), qui a couru les 46 km avec Alain Doeuve à ses côtés. L’AAIRN, très engagée sur la Lucien Aimar-O2&Cie, avait acheté des vélos pour la circonstance et ses participants aux épreuves se sont entraînés 5 mois avant la course.
L’ADIR 31 (Toulouse) était aussi de la partie, avec Jean-Pierre Ligonnet, un toulousain de 71 ans, frappé récemment d’un cancer du poumon et qui s’est engagé sur les 46 km. Isabelle Vera, la présidente de l’association toulousaine avait encouragé Daniel Antoine (61 ans, BPCO stade 4) à venir animer au piano numérique les moments festifs de la rencontre, ce qu’il fit avec brio et succès. J-P Vasseur, président de Calais Respire, était aussi présent avec son équipe, pour assurer la logistique repas de la rencontre. Marie-Agnès Wiss (présidente d’Airsa) s’était déplacée de Mulhouse pour faciliter les inscriptions des coureurs. Enfin, Joël Caplain, délégué de O2&Cie, a réglé les questions d’organisation pour les malades présents. Pas moins de 80 personnes, handicapées respiratoires, voisins ou amis, se sont mobilisées pour la circonstance et faire que l’épreuve cyclo-sportive soit également une belle fête entre amis. Ce qui fut le cas de bout en bout.
De la Roche de Solutré à Hyères
Au nombre des autres challengers de la BPCO figure également le Français Daniel Cloix (photo), 58 ans. Originaire de Macon, il confiait il y a à peine deux mois : “Je ne marchais quasiment plus en décembre dernier et j’ai décidé de reprendre une activité physique soutenue.” En mai dernier, il a atteint son premier objectif : gravir la Roche de Solutré à pied sous assistance respiratoire. Un pari de 4 km, avec 150 mètres de dénivelé. « J’étais si heureux, je n’y croyais pas », explique le Mâconnais, qui a enchaîné en juin avec les 224 marches du phare de Chassiron sur l’Île d’Oléron. “Le lendemain, j’ai décidé de me lancer dans une préparation encore plus intense : ce 4 septembre je serais dans le peloton de “La Lucien Aimar-o2&Cie-Le Souffle pour la Vie” aux côtés de la o2&Cie COPD World Team, au moins jusqu’au 10ème km”. Dans les faits, Daniel a pédalé 20 kmn des Salins à la Londe et retour. “Les médecins m’avaient dit que la pratique d’une activité physique était importante pour moi. Alors petit à petit, j’ai recommencé à marcher”.
C’est avec son kiné, Benoit Chabert, que l’idée de participer à la course de Hyères a germé. Début juin, il envoie un mail à Philippe pour lui faire part de son inscription. “C’est grâce à lui que j’ai pu y aller : ses vidéos, ses exploits m’ont complètement bouleversé. Je me suis dit : tu dois essayer ! Philippe qui m’a alors invité à Hyères. Mais je n’avais jamais fait vraiment du vélo. Je n’en ai pas. J’ai emprunté celui de mon fils. Je me suis entraîné avec mon épouse Chantal en mai dernier.” Depuis le 1er août, André a couru 300 km le long de la Saône, sur la voie bleue et la voie verte (de Cluny à Tésée). Depuis il se sent mieux, presque en forme, n’était-ce son handicap respiratoire. “Je tire comme conséquence de cette participation que beaucoup de gens bien portant – et d’autres moins malades -, nous tendent le bras pour que nous sortions de notre isolement. Voir de vrais coureurs à côté de moi, dont un ancien champion du monde, c’est encourageant. C’est une belle expérience que je conseille à d’autres ! L’an prochain, si je peux faire un peu plus je le ferai.”
Une victoire personnelle
André le Marec (photo à d.), toulonnais, malade pulmonaire depuis 2012, opéré deux fois d’un cancer du poumon en 2014 et 2015, s’est également remis en selle en mai, après une visite de Philippe Poncet au centre de réhabilitation respiratoire (R&R) René Sabran, à Giens où André se trouvait. Il a couru sous les couleurs de l’association “Un Brin d’Air” (Giens) sur la Lucien Aimar, grâce à ce séjour en centre et après avoir pris connaissance des défis lancés à la BPCO par Philippe, qu’il considère être « un exemple à suivre pour tous les malades respiratoires qui veulent sortir de leur isolement et reprendre goût à la vie”. ” Après trois mois en R&R, j’avais repris du poil de la bête. J’ai repris le vélo et j’ai engrangé les kilomètres, progressivement. Philippe est venu nous voir pour nous parler de sa maladie, de ce que les malades insuffisants respiratoires peuvent faire. J’ai eu le courage, l’envie, grâce à cette R&R et au témoignage de Philippe.” ” Je conseille à tous les malades d’aller dans un centre de R&R. On va leur redonner confiance en eux. Ils vont échanger. Il faut sortir de l’isolement. C’est une victoire personnelle.
Jean-Luc Parmentier (photo à g.) a également couru sous les couleurs de “un brin d’Air” aux côtés de son épouse Géraldine, tous accompagnés par Jean-Marie Espinosa..
Le soir du 4 septembre dernier à Hyères, nombreux étaient ainsi ceux qui, malades BPCO ou atteints d’autres pathologies respiratoires, se sont redonnés de nouveaux objectifs pour leur avenir. Quant à Philippe Poncet, sa route devrait le conduire au printemps prochain au vélodrome de Saint-Quentin en Yvelines pour un nouveau record du monde de vitesse sur piste, en départ arrêté.
Au delà, O2&Cie donnera rendez-vous à ses fidèles soutiens pour alerter une nouvelle fois les pouvoirs publics sur ce fléau qu’est la BPCO. “Les malades BPCO sont de plus en plus jeunes, conséquence directe du tabagisme, martèle Philippe. Il faut en France une politique de prévention digne de ce nom. Communiquer sur le tabac, comme on va le faire de septembre à novembre avec l’opération “Moi(s) sans tabac” est une bonne chose. Mais omettre de citer la BPCO, dont la cause principale est le tabac, dans la campagne d’information publique, serait criminel”.
Jean-Jacques Cristofari
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