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Tout savoir sur la cohérence cardiaque

Tout savoir sur la cohérence cardiaque

La baisse de l’amplitude de variation de la fréquence cardiaque, autrement dit de la « variabilité sinusale », est un révélateur de mal-être psychologique et, de manière générale, un marqueur physiologique négatif de la santé de l’individu, physique et psychique. Pratiquer des exercices de cohérence cardiaque permet d’agir sur le tonus du nerf vague et d’entrer ainsi « en cohérence cardiaque ». Il s’agit d’un temps pour soi, afin d’agir sur sa respiration et sur sa santé psychique parfois perturbée par le stress, l’anxiété ou la dépression.

Qu’est-ce que la cohérence cardiaque et comment la pratiquer ? Avec le Dr Jean-Pierre Houppe, cardiologue, promoteur de la psychocardiologie* et formateur en cohérence cardiaque.

La cohérence cardiaque ou, scientifiquement parlant, le « biofeedback de variabilité sinusale » est une méthode grâce à laquelle l’individu apprend à reprendre le contrôle de son système nerveux parasympathique afin de le réguler essentiellement par la respiration.

Photo : Dr Jean-Pierre HOUPPE

Un peu de physiologie pour tout comprendre

A côté du système nerveux somatique qui contrôle nos mouvements et nos perceptions, il existe un système nerveux autonome qui régule certains processus physiologiques, comme la pression artérielle, la fréquence cardiaque, la digestion ou la transpiration. Ce système fonctionne automatiquement (de façon autonome), sans effort conscient de la part de la personne. Il s’agit de la partie du système nerveux qui est liée aux organes internes, mais aussi les vaisseaux sanguins, l’estomac, les intestins, le foie, les reins, la vessie, les organes génitaux, les poumons, les pupilles, le cœur, ainsi que les glandes sudoripares, salivaires et digestives. Ce système nerveux autonome est lui-même divisé en deux parties : le sympathique et le parasympathique.

  • Le système sympathique 🧠 (que les anciens physiologistes appelaient « le nerf de la guerre ») prépare l’organisme à réagir en cas de stress ou d’urgence, pour fuir ou combattre : il augmente alors le rythme cardiaque et la force des contractions cardiaques, et dilate les voies respiratoires pour faciliter la respiration. Il provoque aussi la libération de l’énergie stockée dans le corps. La force musculaire est ainsi augmentée. Il ralentit les processus physiologiques non indispensables en cas d’urgence, comme la digestion.

  • Le système nerveux parasympathique 🧠, au contraire, favorise le ralentissement de l’organisme pour préserver l’énergie. Il diminue ou freine tout ce que le sympathique augmente sauf qu’il stimule l’intestin afin de digérer la nourriture et qu’il favorise l’activité sexuelle en déclenchant la fonction érectile. Le système parasympathique (ou vagal) est sous le contrôle du nerf vagal, aussi appelé « nerf vague » ou « pneumogastrique ». Ce nerf d’origine crânienne est le plus long du corps humain. Il assure la communication entre le cerveau et de nombreux organes du corps, en particulier à l’intérieur des cavités thoracique et abdominale.

👉 Notre organisme est donc en équilibre entre le système sympathique et le système parasympathique, l’un étant dédié à l’action et l’autre, à la récupération. Toutes nos fonctions vitales sont ainsi régulées par ce système, en particulier la fréquence cardiaque, le système sympathique ayant pour mission de l’accélérer (action, stress, fuite, combat) alors que le système parasympathique aura pour rôle de la ralentir (récupération, sommeil, calme, sécurité).

Stimuler le nerf vague grâce aux exercices de respiration

En cas de stress aigu ou lorsque le niveau de stress chronique est trop élevé, le système sympathique est plus sollicité que le système parasympathique. Il est alors possible de rééquilibrer la situation en stimulant son nerf vague au moyen de différents exercices.

🔍 Explications :

Le cœur bat, a priori, de manière régulière. Mais cela n’est pas tout à fait exact, car il existe de minimes variations dans la fréquence cardiaque, que ce soit au repos ou à l’effort, le jour ou la nuit. Cette variation de la fréquence cardiaque s’appelle la « variabilité sinusale ». Celle-ci diminue (cœur qui bat plus rapidement et de manière régulière comme un métronome) dans certaines circonstances psychologiques comme le stress chronique, l’anxiété, la dépression, le burn-out et le stress post-traumatique. La réduction de la variabilité sinusale est en cela un marqueur physiologique d’un problème psychologique. Si on ne sait pas exactement quel rôle joue la variabilité sinusale, en revanche on sait grâce à des études scientifiques solides que le cœur d’un être humain en bonne santé physique et psychique possède une grande variabilité sinusale et qu’il n’est pas fait pour battre comme un parfait métronome.

En cardiologie, on connaît depuis longtemps les effets délétères d’une réduction de la variabilité sinusale, mais tout cela est sous-tendu par des mécanismes psychologiques. En effet, la variabilité sinusale étant altérée dans certaines situations psychologiques, essayer par des exercices de l’augmenter permet de réduire les états de stress aigu ou chronique, d’anxiété, ou de dépression. C’est une thérapeutique d’appoint désormais courante dans le burn-out et le syndrome de stress post-traumatique.

Viser l’équilibre autonome 

Le fonctionnement du système nerveux autonome est à l’origine un équilibre entre le système sympathique et parasympathique (vagal). Lorsqu’un être humain est anxieux, stressé, déprimé, il va subir une dérégulation de son système nerveux autonome aux dépens du système parasympathique et donc une réduction de la variabilité sinusale. C’est comme si le système sympathique prenait le pouvoir en nous plaçant en état d’alerte permanente, nous privant ainsi de toute possibilité de récupération.

💡 Il n’existe aucun moyen, médicamenteux ou technologique pour « muscler » le système parasympathique, alors que c’est un système indispensable pour récupérer. Les seuls moyens pour retrouver une grande variabilité sinusale sont l’activité physique et les techniques de relaxation, de méditation, ainsi que la cohérence cardiaque.

💓 L’objectif de la cohérence cardiaque est d’augmenter la variabilité sinusale en améliorant le tonus vagal, c’est-à-dire le tonus du nerf vague. On ne connaît pas tous les mécanismes impliqués mais le rétablissement d’une plus grande variabilité sinusale, par la cohérence cardiaque notamment, outre un effet sur le tonus du nerf vague, produirait également des effets sur la neurogenèse, c’est-à-dire sur la production de certaines cellules au niveau des aires cérébrales de l’émotion, et sur la connectivité des neurones entre eux.

🔬 Des travaux de recherche sont menés sur l’efficacité de la cohérence cardiaque dans tous les domaines où la variabilité sinusale est altérée qu’il s’agisse du stress, de l’anxiété, de la dépression, du burn-out ou encore du syndrome de stress post-traumatique.

Peut-on mesurer la variabilité sinusale ?

Les cardiologues et certains professionnels utilisent des logiciels qui mesurent la variabilité sinusale. Mais il existe des outils bien plus abordables, comme, par exemple, un capteur au bout du doigt qui, via une application, fournit un score de variabilité sinusale (ou score de cohérence cardiaque) et guide les exercices respiratoires en conséquence.

Pratiquer la cohérence cardiaque : la méthode « 3-6-5 »

La technique du 3-6-5 résume les consignes basiques pour pratiquer la cohérence cardiaque :

  • 3 fois par jour, une fréquence respiratoire de 6 cycles (inspirations/expiration) par minute et ceci pendant 5 minutes. Pour cela, il est conseillé d’adopter une respiration abdominale, d’inspirer par le nez et d’expirer par la bouche. Elle peut se pratiquer dans n’importe quelle situation, mais de manière régulière.
  • Les règles de respiration afin de viser la cohérence cardiaque consiste à se poser, et à ralentir sa respiration afin d’avoir un temps de respiration d’environ 10 secondes par cycle, en prolongeant le temps respiratoire (un temps d’inspiration de 3-4 secondes, un temps expiratoire de 6-7 secondes).
  • L’objectif est de se relaxer en ralentissant sa respiration aux alentours de 6 cycles (inspiration/expiration) par minute avec, grosso modo, un temps expiratoire deux fois plus long que le temps inspiratoire. Une micro-pause est possible entre les deux (inspiration/micro-pause/expiration-micro-pause/ etc.).

Différents protocoles, dont certains plus sophistiqués, existent. Mais déjà, ce protocole basique est le socle des exercices de cohérence cardiaque. Pour les personnes insuffisantes respiratoires, et/ou chez qui l’anxiété peut perturber le souffle, le protocole est à adapter selon ses possibilités respiratoires.

Lorsqu’on obtient un bon score de variabilité sinusale, on se trouve alors en « cohérence cardiaque ».

A côte des logiciels de cohérence cardiaque, de nombreuses applications smartphone existent ; certaines permettent simplement de guider de manière visuelle les temps d’inspiration et d’expiration, d’autres nécessitent un capteur digital et fournissent alors un score de cohérence cardiaque. Cependant, il est parfaitement possible de pratiquer la cohérence cardiaque sans outil, en se fondant uniquement sur sa respiration.

La cohérence cardiaque, une technique complémentaire pour améliorer l’état psychique

Parmi d’autres techniques, dont la méditation de pleine conscience et l’exercice physique, la cohérence cardiaque est une technique complémentaire qui a fait et fait l’objet d’études scientifiques.

👉 Cette technique a fait son entrée il y a déjà quelques années dans les services hospitaliers, en particulier ceux dédiés à la réadaptation cardiaque, dans les suites d’un infarctus du myocarde par exemple, car les études ont objectivé ses bénéfices dont la réduction des récidives d’infarctus. Elle est aussi utilisée pour prendre en soin les personnes ayant subi un stress post-traumatique.

👉 Après la Fédération Française de cardiologie, la toute nouvelle Société française de psycho-allergologie s’y intéresse. En effet, la santé en générale et l’immunité en particulier sont impactées par les phénomènes de stress. Notamment, une crise d’asthme peut être favorisée par l’anxiété et le stress, et inversement, les manifestations des maladies chroniques respiratoires peuvent provoquer ou accentuer le stress, l’anxiété, la dépression. Dans toutes les pathologies, en amont ou en aval de la maladie, une composante psychosociale est présente.

Dr Jean-Pierre Houppe : « La cohérence cardiaque est un outil de plus en plus utilisé dans le soin : agir sur la fréquence cardiaque pour agir sur son état de santé psychologique. Avec une activité physique régulière et la pratique quotidienne de la cohérence cardiaque et de la méditation de pleine conscience, vous avez en main tous les outils pour améliorer votre santé psychique et éloigner le stress, l’anxiété et la dépression, et éventuellement mieux vivre des maladies qui les génèrent. »

* auteur des ouvrages « Le cœur du bonheur » (Éditions J’ai Lu ; 2021) et « Prendre soin de son cœur – Introduction à la psychocardiologie » (Éditions Dunod ; 2015)

ETUDE. Le « biofeedback de variabilité de la fréquence cardiaque » (ou exercices de cohérence cardiaque) est un traitement dans lequel les patients apprennent l’autorégulation d’une fonction physiologique dérégulée du nerf vagal, autrement dit la cohérence cardiaque.
Une revue de la littérature scientifique montre une amélioration significative grâce à cette technique dans les troubles liés au stress comme le trouble de stress post-traumatique, la dépression et le trouble panique, en particulier lorsqu’elle est associée à une thérapie cognitivo-comportementale ou à différents traitements habituels. (1)

📕 Dr Jean-Pierre Houppe, cardiologue – Le cœur du bonheur
« Près de 400 personnes décèdent chaque jour de maladies cardiovasculaires en France. Stress, anxiété, dépression, colère et tristesse sont des facteurs de risque cardiovasculaires désormais bien démontrés. Or, on peut aussi protéger son cœur de façon simple et naturelle, en cultivant petits et grands moments de bonheur. Le bien-être, l’optimisme, la psychologie positive protègent le cœur. Ils ne contrecarrent pas uniquement les effets négatifs des facteurs de risque : leur effet est cardioprotecteur. Une méta-analyse parue en 2019 a montré que l’optimisme avait un effet protecteur de plus de 30 %. » 

Pour pratiquer la cohérence cardiaque :

Respiration Cohérence cardiaque 5 min. Version-4, par Alain PHILIPPE :

🤳 Les applications mobiles de cohérence cardiaque : RespiRelax+ (App Store ; Google Play); Top Breath ; Kardia, etc.

🧘‍♀ Neoflo, un dispositif sous forme de ceinture abdominale qui accompagne la respiration pour pratiquer la cohérence cardiaque. Ici, la respiration est calée sur le ressenti tactile et non pas sur la vue comme avec les applications (https://neoflo.co).

💻 Des conférences à suivre en replay 

Colloque universitaire (Unité de Formation et de Recherche en Santé). Respiration et cardiologie : la cohérence cardiaque, par le Dr Jean-Pierre Houppe

Développer la cohérence cardiaque, par Charly Cungi, psychiatre, psychothérapeute et auteur de nombreux ouvrages, dont « La cohérence cardiaque : Nouvelles techniques pour faire face au stress » : https://www.youtube.com/watch?v=7uTusexAr7s

Conférence proposée par La Maison des Sciences de l’Homme Alpes (MSH-Alpes) est une unité de service et de recherche du CNRS et de l’Université Grenoble Alpes.

Référence

(1) Blase,K.;Vermetten,E.; Lehrer, P.; Gevirtz, R. Neurophysiological Approach by Self-Control of Your Stress-Related Autonomic Nervous System with Depression, Stress and Anxiety Patients. Int. J. Environ. Res. Public Health 2021, 18, 3329.  

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