La bronchopneumopathie chronique obstructive reste une maladie largement ignorée. Une étude française parue à l’automne 2018 (Baromètre santé 2017) * et qui confirme les résultats du sondage conduit par l’Association BPCO en 2014 ne peut que constater le long chemin qu’il reste à parcourir pour que celle-ci soit connue et reconnue, par la population comme par les politiques.
Le dernier Baromètre santé 2017 de Santé Publique France consacré à la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) souligne un constat regrettable : la grande majorité des Français n’a jamais entendu parler de la BPCO. 22,1% des personnes enquêtées ont répondu avoir déjà entendu parler de la BPCO (25% chez les 40 ans ou plus), parmi lesquelles moins d’un tiers a identifié le tabac comme principal responsable (32,3%). 19,3% ont cité la pollution de l’air comme pouvant être l’une des causes, 13,6% les infections respiratoires, 2% une origine génétique ou congénitale. 2,2% ont répondu qu’il s’agissait d’une maladie respiratoire sans être en mesure de désigner un coupable.
Le sondage OpinionWay paru en 2014 pour L’Association BPCO avait livré des résultats identiques avec 78% des sondés qui n’avaient pas entendu parler de la BPCO. Plus de 40% n’avaient aucune idée des principaux facteurs de risque de la BPCO.
Selon les analyses menées à partir du Baromètre santé 2017, la probabilité de connaître la BPCO était plus élevée chez les femmes, chez les personnes de catégorie socioprofessionnelle supérieure ou intermédiaire et chez les fumeurs. Plus les individus avançaient en âge, plus leur niveau de diplôme était élevé, et plus ils connaissaient la maladie.
Mais au final, ce sont les personnes de faible niveau socioéconomique qui cumulent une plus grande exposition au principal facteur de risque de la BPCO et une moindre connaissance de la maladie.
Dans l’enquête Ibis (Information sur la BPCO pour un impact sanitaire) déjà ancienne, publiée en 2004, 8% des sondés avaient entendu le terme BPCO. D’où l’espoir des auteurs du Baromètre santé 2017 qui croient voir dans cette progression le témoignage « d’une amélioration de la connaissance du terme BPCO au sein de la population française au cours des 10 à 15 dernières années ». D’autres études ont montré que les termes « bronchite chronique » et « emphysème » étaient bien plus fréquemment connus que « BPCO ».
Pourtant, une meilleure connaissance de la BPCO par le grand public et la perception du risque de développer cette maladie pourrait servir de levier pour inciter les fumeurs à arrêter. Cela permettrait également de favoriser le diagnostic précoce de la maladie ; encore aujourd’hui, les trois quarts des personnes atteintes de BPCO ne se savent pas malades.
En France, les campagnes de communication portant sur les risques pour la santé liés au tabagisme ou encore les avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes ciblent avant tout les risques de cancer et de maladies cardiovasculaires. En 2013, ils représentaient respectivement 62% et 23% des 73 000 décès attribuables au tabac, contre 15% pour les maladies respiratoires non cancéreuses dont la BPCO.
BPCO, cancer du poumon… désormais des maladies de femmeDans les années 1950, fumer était marginal chez les femmes. Puis cette pratique s’est envolée au début des années 70, atteignant 30 % en 2010. Dans ce même numéro du Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire * du 30 octobre 2018, les spécialistes constatent avec désormais suffisamment de recul que l’explosion du tabagisme féminin s’est effectivement traduite par une augmentation des conséquences sur la santé générale et de la mortalité liées au tabac. Cependant, si le nombre de cancers du poumon, de patients hospitalisés pour infarctus du myocarde ou pour exacerbation de BPCO ainsi que les décès dus à ces affections restent moins importants que chez les hommes, la dynamique d’évolution de ces pathologies est extrêmement préoccupante chez les femmes, notamment entre 45 et 64 ans, les premières classes d’âge à avoir adopté la cigarette dans les années 70. Notamment, le taux d’hospitalisations pour une exacerbation de BPCO a doublé chez les femmes entre 2002 et 2015. Il n’a augmenté “que” de 30 % chez les hommes. Les décès imputables à la BPCO ont augmenté de 3 % chez les femmes entre 2000 et 2015 alors qu’ils ont diminué de 21 % chez les hommes. In fine, cancer du poumon, BPCO et infarctus du myocarde sont bel et bien devenus chez les femmes les principales causes de mortalité. Toutes maladies confondues, Santé Publique France évalue qu’en 2014, 54 600 hommes et 19 000 femmes sont décédés des conséquences du tabagisme. Pour les femmes, c’est deux fois plus qu’en 2000. Il est encore trop tôt pour repérer si la chute très récente du nombre de fumeurs entre 2016 et 2017, estimée entre 12 et 13 millions de fumeurs, a concerné plutôt les hommes ou les femmes. Pour sa part, Santé Publique France estime qu’en 2017, après quelques années de stabilité, le tabagisme quotidien est en baisse, et ce dans les deux sexes. |
Hélène Joubert, journaliste
**En 2017, l’enquête a été conduite par téléphone auprès de 25 319 personnes âgées de 18 à 75 ans, résidant en France métropolitaine et parlant français.