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Polluants intérieurs et santé respiratoire, que savons-nous ?

Polluants intérieurs et santé respiratoire, que savons-nous ?

Les allergènes sont les principaux facteurs de risque de maladie respiratoire. 30 % des Français (nés après 1980) sont aujourd’hui allergiques (asthme allergique, rhinite, conjonctivite…), 50 % selon les projections d’ici 20 à 30 ans. 80 % des asthmes allergiques de l’enfant et 50 % chez l’adulte sont dus aux acariens. L’un des principaux facteurs favorisant dans l’asthme sont les pneumallergènes dits domestiques, que l’on retrouve à l’intérieur des habitations, tels que les squames d’animaux familiers, les acariens de la poussière domestique et les moisissures (2).

A côté de ces allergènes, il existe des cofacteurs chimiques, polluants bien identifiés de l’environnement intérieur. Ce sont les composés organiques volatils ou COV (formaldéhyde, terpènes retrouvés dans les parfums d’intérieur, les solvants contenus dans les peintures, les colles, les vernis, etc., dangereux même à faible dose), et les ammoniums quaternaires présents dans les désinfectants, les produits ménagers, bien connus pour déclencher de l’asthme.

Des études en population générale ont mis en évidence un lien entre symptômes d’asthme et taux domestiques élevés de formaldéhyde (agent de conservation et désinfectant) (3). « Nous avons conduit une étude (4) qui a souligné l’importance des cofacteurs polluants chimiques, explique le Pr Frédéric de Blay, responsable du service d’allergologie, d’asthmologie et de pathologie respiratoire de l’environnement (Hôpitaux universitaires de Strasbourg), conduite auprès de 250 patients asthmatiques allergiques aux acariens. Tous étaient allergiques aux acariens, mais ceux qui manifestaient de l’asthme étaient plus souvent exposés aux polluants chimiques. » De plus, certains COV pourraient accroître le risque de décompenser une BPCO. Cependant, les données sont très préliminaires.

En ce qui concerne les moisissures dans les pièces de vie, elles sont la première source de pollution intérieure à l’origine d’exacerbations de pathologies respiratoires (asthme décompensé, toux aggravée, rhinite, infections respiratoires). Les moisissures, outre leur effet allergisant, libèrent des composés organiques volatils, des mycotoxines, très irritants pour les bronches. Le développement excessif de moisissures induit un risque de toux, de sifflements et d’asthme approximativement doublé (5). « La relation de cause à effet est parfaitement établie chez l’enfant et l’adolescent entre une exposition persistante aux moisissures et la toux, l’initiation d’un asthme et son aggravation, indique Frédéric de Blay. Elle reste à démontrer chez l’adulte où l’on sait néanmoins qu’elles peuvent déclencher l’aggravation d’un asthme préexistant. » Les pneumopathies interstitielles peuvent être provoquées par des moisissures (Aspergillus, Penicillium, Cladosporium et Alternaria…) (6). Les personnes atteintes de mucoviscidose peuvent contracter une aspergillose broncho-pulmonaire allergique, dangereuse également chez des personnes ayant un cancer, une greffe… « Si l’on souffre de troubles respiratoires, conseille le Pr Denis Caillaud, chef du service de pneumologie (CHU de Clermont-Ferrand), il faut traiter cette pollution dès que plus d’un tiers de m2 de surface par pièce est moisie. » Les moisissures peuvent déclencher des symptômes inflammatoires sans mécanisme allergique dans un cas sur deux. Il ne faut pas négliger les moisissures entretenues par l’arrosage de plantes d’intérieur. « Il ne devrait pas y avoir plus de cinq plantes dans une pièce pour ne pas exacerber les symptômes respiratoires d’un asthme ou d’une allergie », précise Denis Caillaud.

La rhinite et la conjonctivite peuvent être d’origine allergique et déclenchées par les allergènes de l’habitat (acariens, chat, chien, moisissures), ou être favorisées par des polluants irritants comme les COV. Pour leur part, les ammoniums quaternaires sont capables d’induire des asthmes professionnels, mais leur utilisation de plus en plus large à la maison peut être responsable aussi de manifestations asthmatiques. Une autre pathologie se rencontre de plus en plus fréquemment : les dysfonctions laryngées (impression que le larynx se « serre », toux aboyantes…), en dehors même de la présence d’un asthme, et plus particulièrement chez les femmes – leurs cordes vocales fonctionnant à une fréquence plus haute et contenant moins d’acide hyaluronique. « Dans une étude que nous avons menée, 66 % des femmes asthmatiques sous corticoïdes inhalés avaient une anomalie fonctionnelle du larynx, complète Frédéric de Blay. La dysfonction n’était pas due à la prise de corticoïdes ou à la sévérité de l’asthme mais liée aux polluants chimiques (terpènes et ammoniums quaternaires, principalement).

Sans oublier le tabagisme actif et passif à l’intérieur du domicile qui fait le lit de l’asthme. Le tabac accentue la sévérité des manifestations asthmatiques et limite l’efficacité des médicaments. Or, « les asthmatiques fument plus fréquemment que la population générale », constate le Pr Denis Caillaud.

Tabagisme, moisissures, acariens et produits d’entretien, revêtements de sols et autres peintures… Un cocktail détonnant rencontré plus souvent qu’on ne l’imagine au sein des logements.

 

(2) Barnig C et al. Presse Med. 2016; 45: 1030–1042 
(3) 51 Norback D, Bjornsson E, Janson C, Widstrom J, Boman G. Asthmatic symptoms and vola-tile organic compounds, formaldehyde, and carbon dioxide in dwellings. Occup Env Med 1995;52(6):388–95.
(4) Cluster analysis of indoor environmental factors associated with symptoms of mite allergy EdouardVirotMD∗ Annals of Allergy, Asthma & Immunology. Volume 123, Issue 3, September 2019, Pages 280-283
(5) Bornehag C et al.  Indoor Air 2001;11:72–86.

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