Mauvaise haleine (halitose), dents et tissus environnants tachés et jaunis nécessitant des détartrages et des aéropolissages réguliers, retard de cicatrisation après une extraction dentaire ou une chirurgie buccale (pose d’implants…), maladies gingivales, perte de dents, cancers de la cavité buccale… Afficher un beau sourire et une bouche saine est une raison supplémentaire de bannir la cigarette de son quotidien.

Les chirurgiens-dentistes s’impliquent aussi dans la lutte anti-tabac. A raison : de nombreux décès sont directement imputables aux cancers de la bouche et d’autres maladies bucco-dentaires sont favorisées par la consommation de cigarettes.

La muqueuse buccale n’est pas épargnée, avec la possible apparition de candidoses (mycoses) ainsi que de lésions blanchâtres (leucoplasies ou leucokératoses), à placer sous surveillance du fait d’une évolution possible vers un cancer.

Cancers buccaux et tabac, une relation bien établie

Concernant le risque de cancers de la cavité buccale (lèvres, plancher de la bouche, de la langue, des piliers de l’amygdale, etc.), on estime que fumer multiplie le risque par six d’en développer. Ces cancers représentent 25 à 30% des cancers des voies aéro-digestives supérieures.

La maladie parodontale n’est pas en reste ; le déchaussement des dents est accru. Cette maladie d’origine infectieuse (bactéries) touche et détruit les tissus de soutien des dents (gencives et os). En effet, les composants du tabac déséquilibrent la composition de la flore bactérienne, d’où des modifications cellulaires de la gencive. La gingivite guette et peut évoluer, surtout en cas de mauvaise hygiène dentaire, vers une forme inquiétante mais rare, la gingivite ulcéro-nécrotique.

Mais de nombreux troubles sont réversibles à l’arrêt du tabac, à court ou moyen terme. Dès 48 heures après la dernière cigarette le goût, l’odorat, l’haleine s’améliorent. Après douze mois, l’état de la muqueuse buccale revient à la normale et le risque de cancer buccal rejoint celui des non-fumeurs au bout de dix ans.

FOCUS : Le tabac ne provoque pas mais aggrave la maladie parodontale, et perturbe la cicatrisation lors de traitement.

Pourquoi une évolution des maladies parodontales est-elle beaucoup plus rapide chez le fumeur ? La fumée du tabac est riche en monoxyde de carbone et appauvrit en oxygène le sang circulant dans les capillaires gingivaux, asphyxiant les tissus parodontaux. En outre, la nicotine entraîne une diminution du calibre des vaisseaux sanguins (vasoconstriction) au niveau de la bouche et notamment au niveau de la gencive. A plus long terme, ces effets entraînent une altération physiologique de l’os alvéolaire aboutissant à la création de poches parodontales. On observe également chez les fumeurs une diminution de l’efficacité de la réaction inflammatoire par altération du système de défense (polynucléaires neutrophiles, etc.) et une diminution de la synthèse matricielle qui explique l’altération de la cicatrisation. Tout cela concourt à un tissu parodontal plus vulnérable aux agressions bactériennes.  

« Le tabagisme est reconnu comme étant particulièrement délétère pour les tissus parodontaux, résume le Dr Sophie-Myriam Dridi (MCU Paris Descartes & PH Hôpital A. Chenevier). Les effets biochimiques du tabac sont multiples, directs et indirects. Les fumeurs ont trois à six fois plus de risque de présenter des pertes du support parodontal (gencive et os) sévères et évolutives par rapport aux non-fumeurs ou aux ex-fumeurs. Par ailleurs, la sévérité de la parodontite augmente avec la quantité de tabac consommée par jour et la durée de l’exposition. »

De plus, le fait de fumer complique les traitements parodontiques, rendus moins efficaces voire contre-indiqués en cas de tabagisme, exposant la personne à un risque accru de perte dentaire. La plaque dentaire se calcifie (tarte) et s’infiltre sous la gencive. On peut l’en déloger par un détartrage en profondeur tous les six mois, et nettoyer la pellicule (cément) qui entoure la dent au niveau de la gencive. Mais c’est un « surfaçage » peu efficace si l’on n’arrête pas de fumer. En cas de lésions osseuses, le dentiste doit décoller la gencive pour inciser l’os et le nettoyer. Mais en cas de tabagisme persistant, cette intervention est risquée : la cicatrisation est lente et expose la plaie aux infections, avec un risque important de complications post-opératoires. Si les actes de chirurgie dentaire chez un patient fumeur sont délicats, il en va de même pour les actes d’implantologie dentaire, car en plus des surinfections potentielles, la probabilité de rejet de l’implant augmente considérablement. Mais il y a de l’espoir : en cessant de fumer trois à six mois avant l’intervention, un fumeur (plus de dix cigarettes quotidiennes) parvient à normaliser la vascularisation des capillaires sanguins et peut ainsi envisager un acte de chirurgie ou d’implantologie.

HJ

Pour en savoir plus :

UFSBD (Union française pour la santé bucco-dentaire)

France Assos Santé