Témoignages

« L’activité physique peut effectivement devenir une habitude positive, voire une forme d’addiction bénéfique pour la santé. »

Témoignage – Agnès de Chassey, patiente atteinte de BPCO (Paris)

La prescription d’activité physique adaptée (APA) par votre médecin serait-elle bénéfique selon vous ? Avez-vous déjà bénéficié d’une telle prescription ?

Non, je n’ai jamais reçu de prescription d’APA, excepté lors de séjours de réadaptation respiratoire – jamais pour une prise en charge à domicile ou en cabinet en ville.

Mais en effet, une prescription pourrait constituer un moyen incitatif assez efficace. D’une part, elle implique un suivi médical, ce qui motive le patient à respecter la prescription. De plus, la prescription signifie que l’activité proposée complète le traitement, et fait partie intégrante de celui-ci. Le médecin attend un compte-rendu de cette prescription, ce qui favorise la transparence. En cas de non-respect, il est nécessaire d’expliquer les raisons, ce qui contribue à assumer la situation. Cela crée un suivi adéquat.

Dans le cas où des centres d’exercices accessibles, sur le plan matériel et financier, me seraient proposés, ou si l’APA pouvait être réalisée à domicile avec des équipements tels qu’un élastique ou des objets du quotidien, cela serait très avantageux. Il me serait utile de recevoir des conseils sur la pratique d’exercices à domicile, en utilisant des objets courants tels que des bouteilles d’eau comme haltères. Il est indéniable que les bénéfices d’une prescription sont nombreux.

Cependant, il est impératif que ces prescriptions soient prises en charge par la Sécurité sociale ou les mutuelles, car les coûts des abonnements à des clubs de sport, par exemple, sont prohibitifs pour de nombreuses personnes. De plus, la façon dont les entraîneurs dans ces clubs se concentrent sur la performance, plutôt que sur l’endurance, constitue un obstacle pour nous, les personnes malades chroniques et insuffisantes respiratoires en particulier. Les patients atteints de maladies chroniques ont besoin d’une approche plus douce, progressive et axée sur l’endurance, plutôt que sur la performance immédiate. Un enseignant en APA serait plus à même de comprendre nos besoins et de s’adapter à nos difficultés, par rapport à un coach ordinaire.

Quel pourrait être l’élément incitatif fort pour mettre en place une activité physique de manière durable ?

Il est difficile d’appréhender les bienfaits d’une approche sans l’avoir expérimentée. Dans le contexte des maladies chroniques respiratoires, mais également pour les patients diabétiques ou ceux en phase de rémission après un cancer, je considère que débuter ce processus dans un cadre médical, que ce soit en hospitalisation de jour ou en réadaptation, est important.

Au sein de ces environnements médicaux, les bénéfices deviennent évidents. Par exemple, après un séjour en réadaptation respiratoire de trois semaines, le fait d’avoir été encouragé à se lever chaque matin pour effectuer une brève marche, suivie d’une heure de vélo, ainsi qu’une demi-heure d’exercices avec des élastiques, en raison de leur caractère doux, montre clairement les avantages de cette approche. Cette routine instaurée de manière régulière chaque jour, parfois contrainte au départ, constitue une prise en charge complète. Après le retour à domicile, il devient évident que la continuité de ces prescriptions est essentielle. Mais au départ, il faut « initier le mouvement » dans un cadre sécurisant.

La pratique de l’activité physique en groupe est-elle essentielle pour vous ?

Je pratique la marche, mais en compagnie de mes amies ou du chien dont j’ai ponctuellement la garde. C’est une expérience très positive, car cela me maintient en mouvement. Cela dit, je me demande si cette approche convient à tous. Il est possible que certaines personnes plus âgées nécessitent une approche plus personnalisée, avec une personne qui se déplacerait chez eux pour les accompagner et les aider à effectuer leurs exercices. Après en avoir constaté les bienfaits, ils pourraient être davantage enclins à partager ces activités avec leur conjoint, leurs enfants, leurs petits-enfants ou leurs voisins. L’essentiel est de proposer une variété d’activités physiques et de prendre en compte les préférences de chacun, de considérer le patient dans son entièreté (sa personnalité, son environnement familial, professionnel, économique…). Si un patient se sent mal à l’aise dans un environnement de groupe en cabinet, il faudrait envisager des ajustements pour qu’il se sente à l’aise. L’écoute attentive du patient demeure primordiale.

Quelles sont les difficultés majeures à l’initiation et à la poursuite d’une activité physique ?

C’est la motivation. Promener un chien est bénéfique, et pas si anecdotique que cela. Mais au vu du coût, je ne pourrais pas en posséder un. Je trouve que le chien, pour les malades chroniques, devrait presque être prescrit, avec des consultations vétérinaires solidaires !

Quels seraient vos messages aux personnes insuffisantes respiratoires vis-à-vis de l’activité physique, et à leurs médecins, mais également aux politiques ?

La motivation, c’est un élément clé. Par exemple, la présence d’un chien ou la compagnie d’enfants en bas âge peut constituer une source de motivation pour les personnes atteintes de maladies chroniques, y compris les plus jeunes. La perspective de pouvoir marcher jusqu’à l’école avec eux peut devenir un puissant moteur. L’essentiel est de trouver ce qui motive chaque individu.

En ce qui concerne les objectifs, il est préférable de ne pas s’en fixer de trop ambitieux. Au contraire, il est important de créer une petite routine, qui devient plus facile à suivre avec le temps. L’activité physique peut effectivement devenir une habitude positive, voire une forme d’addiction bénéfique pour la santé.

Quant aux professionnels de santé, il est essentiel qu’ils communiquent sur l’importance de l’activité physique de manière adaptée à chaque patient, sans le décourager. Il faut être particulièrement attentif aux patients en surpoids, qui peuvent avoir des difficultés à bouger. Les exercices à domicile peuvent être une excellente approche pour leur faire prendre conscience de ce qu’ils peuvent accomplir à la maison, même des gestes simples comme lacer leurs chaussures. Des activités quotidiennes, comme faire soi-même ses petites courses, à pied, se rendre à la boulangerie, peuvent également s’inscrire dans leur routine et doivent être encouragées. De plus, le soignant doit considérer le patient dans sa totalité, comprenant son état physique, mental et médical. Le regard souvent négatif que les patients portent sur eux-mêmes nécessite un soutien bienveillant de la part des médecins. Trouver ce petit déclencheur qui ravive l’étincelle dans l’esprit du patient est essentiel.

Quant aux autorités publiques et politiques, leur rôle est à mon sens d’encourager l’activité physique régulière, ce qui permettra de réduire les coûts liés aux traitements, aux hospitalisations et aux médicaments. Cela profite à la Sécurité sociale et aux mutuelles, créant ainsi une situation gagnant-gagnant. Il est vrai que cette approche nécessite une vision à moyen et long terme, mais les avantages se manifestent rapidement. Les patients qui mettent en place une routine constatent une amélioration de leur santé et de leur bien-être mental dès le moyen terme.

Livre des 16es Rencontres Santé respiratoire France : retour au sommaire