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La yoga-thérapie pour traiter les troubles respiratoires

Mieux respirer. L’approche en yoga-thérapie est globale. « Que vous souffriez d’asthme, de BPCO ou d’un autre trouble respiratoire [de fibrose pulmonaire, d’emphysème, ou de Covid long, etc., ndlr], les réponses apportées par la yoga-thérapie sont les mêmes : adaptées, progressives et efficaces. » Les explications du Dr Lionel Coudron, professeur de yoga-thérapie.

Dr Lionel Coudron : biographie

Le Docteur Lionel Coudron enseigne le yoga depuis plus de 40 ans. Il est co-fondateur de l’Association Médecine et Yoga. Ancien président de l’école de professeurs de la Fédération Française de Hatha Yoga, il enseigne dans différentes écoles de professeurs de yoga. Il est le fondateur de l’Institut de yoga-thérapie (Paris) qui forme des professeurs. Médecin généraliste, diplômé en nutrition, nutrithérapie, acupuncture, biologie, médecine du sport, psychothérapie EMDR, il est également auteur d’ouvrages de référence sur le yoga et la santé, dont celui paru en 2020 chez Odile Jacob « Yogathérapie, Traiter les troubles respiratoires » (ISBN 978-2-7381-5530-2)

Médecin et yoga thérapeute, pouvez-vous nous décrire votre parcours ?

Dr Lionel Coudron : « J’ai commencé le yoga à 14 ans. C’est ce qui m’a donné envie de devenir professeur de yoga, puis d’être médecin. Je me suis en effet rendu compte de l’intérêt du yoga dans le domaine de la santé, c’est pourquoi j’ai créé l’Institut de yoga-thérapie en 1993, que je dirige. Outre des diplômes universitaires en nutrition, en traumatologie du sport, etc., des formations en psychothérapie cognitivo-comportementale m’ont été utiles, de façon à pouvoir mieux comprendre la pratique du yoga, et mieux l’adapter aux patients, mon objectif fondamental.

Par ailleurs, le groupe Clinéa ORPEA (500 cliniques en France et à l’international) m’a sollicité pour faire entrer la yoga-thérapie dans les établissements de soins, consulter auprès du lit du patient.

Yoga et yoga-thérapie sont-ils synonymes ?

Dr Lionel Coudron : Pas tout-à-fait, parce que la yoga-thérapie est l’application du yoga auprès du patient, en individuel généralement, ou en groupes homogènes. L’objectif est de cerner la problématique de la personne afin d’améliorer son état, son vécu ou sa pathologie. Il s’agit d’installer un niveau de sérénité et d’apaisement. Cela va se traduire à la fois dans le corps par un sentiment de plus grande fluidité, par une élimination des tensions et des manifestations pénibles, par une respiration plus ample et facilitée mais aussi par des pensées plus sereines. Tout cela va se mesurer, se ressentir précisément auprès du patient.

Sur quelles techniques la pratique du yoga s’appuie-t-elle ?

Dr Lionel Coudron : Notre boîte à outils est composée de postures, d’enchaînements, de respirations, de techniques de relaxation, de méditation, de visualisation… Nous disposons également d’outils d’observation, de prise de conscience. J’entends par là être capable d’être attentif à ce que l’on ressent, pour bien identifier ce qui se joue dans notre corps, être conscient de ce qui se passe dans notre tête comme les pensées pénibles et irrationnelles, nos émotions, notre état émotionnel, et leur traduction dans notre corps. Et aussi d’observer les circonstances, les déclencheurs, pour que justement nous puissions agir sur tous ces paramètres.

Quels sont les différents types de yoga ?

Dr Lionel Coudron : A l’origine, il y a plus de 2 000 ans, le yoga était plus une philosophie – au sens grec du terme. Puis, cela a évolué vers une forme de méditation, laquelle s’est enrichie de diverses postures. Au cours du XXe siècle, il y a eu une diversification des écoles, des pédagogies de yoga. Au XXIe siècle, les manières de l’aborder se sont multipliées au point que l’on peut dénombrer cinquante écoles au minimum.

Il existe des yogas plus posturaux, plus physiques, des yogas plutôt axés sur la relaxation, des yogas plus méditatifs… Donc les pédagogies vont pouvoir varier. Mais ce qui est nécessaire, pour que cela reste du yoga, est un travail conjoint du corps, de la respiration et des pensées, dans un environnement de bienveillance, avec une évolution vers une ambiance apaisée, bénéfique et agréable.

A cette fin, dix règles ont été édictées il y a 2 000 ans. La première, « Primum non nocere », signifie ne pas se faire mal et, parmi les autres : ne pas nuire ; être sincère ; faire de son mieux ; l’absence de compétition avec soi ou avec les autres ; voir les choses de façon positive (donc le verre à moitié plein et pas à moitié vide) ; prendre conscience de ce qui se passe à l’instant donné, être conscient de soi ; être également dans l’acceptation ; lâcher prise (c’est la confiance dans la vie) ; et enfin, l’action – agir et transformer.

Qu’est-ce qui différencie le yoga de la méditation de pleine conscience ?

Dr Lionel Coudron : C’est peu connu, mais à l’origine, le yoga est de la méditation. Et ce que l’on appelle « méditation de pleine conscience » est normalement intégré dans la pratique du yoga. Dès les premières lignes des Yoga Sutras qui datent de 2 000 ans, il est écrit que l’on doit travailler dans le détachement, dans l’observation de soi, devenir le témoin de ce qui se passe, c’est-à-dire développer la prise de conscience, la position de témoin. Cela permet de prendre du recul par rapport à ses réactions, en particulier émotionnelles qui sont source de souffrances, de perturbations, de mal-être.

A la différence que dans le yoga, le corps a toujours fait partie intégrante de cet état : si l’on pratique des postures, on transforme l’ambiance dans son corps, donc l’état émotionnel dans lequel on se trouve. Les pensées changent également, elles sont apaisées, facilitant ainsi le travail de transformation par la méditation.

Est-ce que tout le monde peut pratiquer le yoga, à tout âge, dans toute condition physique ?

Dr Lionel Coudron : Absolument. C’est même l’un des points forts du yoga. Bien entendu, tout le monde ne peut pas pratiquer n’importe quel yoga, mais on peut être pratiquant quel que soit l’âge. J’ai déjà eu des élèves qui avaient plus de 90 ans.

En quoi le yoga peut-il améliorer les troubles des patients insuffisants respiratoires ?

Dr Lionel Coudron : Le yoga repose sur des postures, de la méditation, de la relaxation, et aussi sur la respiration, jusqu’à développer à l’extrême le travail respiratoire.

La respiration est aussi une technique qui est utilisée dans toutes les méthodes pour gérer l’anxiété, le trac, le stress… Le yoga a vraiment développé la respiration parce que cela permet de travailler sur notre état et sur notre ambiance. Encore faut-il encore que notre corps soit capable de pouvoir utiliser au mieux ses ressources. C’est pourquoi il existe deux volets dans le yoga vis-à-vis de la respiration.

Le premier volet consiste en la mise en condition pour travailler la respiration, une sorte de rééducation respiratoire. Il faut donc travailler tout le système mécanique autour du poumon, ostéo-articulaire et musculaire. Si les côtes ne s’articulent pas correctement les unes par rapport aux autres, si elles sont grippées, les poumons ne pourront se remplir pleinement, ni bien se vider. Si, par exemple, mes muscles pectoraux sont rétractés, cela va me voûter vers l’avant. Je serai en cyphose et mon ventre sera complètement replié, sans pouvoir m’aérer.

C’est pourquoi le yoga va travailler sur cet espace ostéo-articulaire et musculaire, mais aussi sur le diaphragme -le moteur principal de la respiration. Ce travail préalable de rééducation respiratoire utilise des postures, des mouvements conjoints à la respiration. Et ce, je le répète, en étant conscient de ce que l’on fait.  

L’exercice intitulé « respiration complète » ou « mouvement de liaison » permet de bien rééduquer l’ensemble ostéo-articulaire. Cette rééducation respiratoire est un préambule bénéfique chez tout un chacun. Puis un second exercice facilite des expectorations pour éliminer les sécrétions, pour améliorer la respiration. En effet, dans le cas d’affections comme la BPCO et des pathologies qui peuvent être sécrétantes, des exercices vont permettre d’éliminer ces sécrétions, améliorant ainsi la ventilation. « La respiration purifiante » est un exercice très simple, qui correspond d’ailleurs à certains exercices de kinésithérapie qui permettent d’éliminer ces sécrétions.

La yoga-thérapie est encore insuffisamment développéedans les stages de réadaptation respiratoire. Néanmoins, un travail spécifique est proposé dans certaines cliniques aux patients ayant des troubles respiratoires chroniques.

A ce jour, la pratique du yoga relève donc de l’initiative personnelle, dans certains centres ?

Dr Lionel Coudron : Oui, c’est encore trop insuffisamment généralisé, mais ça se développe. C’est essentiel car la respiration, lorsqu’elle est perturbée, est très anxiogène. La pratique du yoga va permettre de casser ce cercle vicieux de l’anxiété dans la pathologie respiratoire. Certaines études ont mis en évidence une amélioration des symptômes, mais aussi du niveau d’anxiété. Vis-à-vis des troubles somatoformes respiratoires, c’est-à-dire ces troubles respiratoires à l’origine d’oppressions, du sentiment d’avoir besoin de respirer, de soupirer profondément, de bâillements intempestifs, de difficultés de déglutition, de troubles laryngés…, la pratique du yoga est également très salutaire : en deux, trois mois, les troubles s’améliorent vraiment. Ce serait dommage de ne pas y penser.

Des études ont démontré les bienfaits du yoga sur la BPCO, dans l’asthme, sur le stress et l’anxiété, et même sur l’inflammation chronique : le yoga permettrait-il d’abaisser le seuil inflammatoire dans ces maladies ?

Dr Lionel Coudron : Le yoga a un effet parasympatico-tonique : il renforce le versant parasympathique du système neurovégétatif, d’où une action anti-inflammatoire majeure. Or, dans ces pathologies – que ce soit l’asthme, la bronchite chronique ou autres -, il y a toujours un fond inflammatoire. Le yoga agit non seulement sur cette inflammation générale, via le système parasympathique, mais également au niveau du microbiote, facteurs d’inflammation qu’on appelle « de bas grade ».

Des études menées dans des pathologies de type métabolique (diabète) ou dans les maladies cardiovasculaires ont effectivement constaté que la pratique du yoga induit une baisse des cytokines pro-inflammatoires, qui sont des marqueurs de l’inflammation.

Quelle est la fréquence souhaitée de pratique du yoga chez une personne insuffisante respiratoire ?

Dr Lionel Coudron : Parfois cela peut aller très, très vite. Les études portent en moyenne sur douze semaines, d’autres sur trois mois, au rythme de trois heures par semaine soit vingt minutes par jour. Vingt minutes par jour pendant trois mois suffisent donc pour obtenir des résultats mais bien souvent, l’amélioration est plus rapide.

La personne suit donc des cours, et ensuite pratique le yoga, chez elle, de manière régulière, voire quotidienne ?

Dr Lionel Coudron : Exactement. En yoga-thérapie, le patient a obligation de travailler chez lui. Pratiquer une fois par semaine sera insuffisant. L’effet est « dose-dépendant » : s’il pratique une heure par semaine, le patient récoltera le bénéfice d’une heure par semaine ; s’il s’astreint à vingt minutes par jour, les résultats seront d’autant plus importants.

Comment la pratique du yoga est-elle mise en place ?

Dr Lionel Coudron : En consultation, le yoga-thérapeute va montrer l’exercice et examiner la manière dont le patient le reproduit. Il le corrigera voire adaptera l’exercice. Au début, ces séances sont hebdomadaires. Le patient peut repartir avec des supports vidéo ou audio et des conseils d’applications. Sur ce point, voici une page que j’ai créée avec des exercices guidés par la voix : http://www.idyt.com/votre-pratique/

La formation des thérapeutes est-elle régulée par un diplôme, une instance officielle ?

Dr Lionel Coudron : Sur le site de l’Institut de yoga-thérapie, vous avez un annuaire des yoga-thérapeutes, en France et dans les pays limitrophes. Mais il n’existe pas de diplôme reconnu. Deux centres de yoga-thérapie existent en France, le nôtre et celui de Bernard Bouanchaud (ViniYoga Fondation). Comme vous le voyez, nous ne sommes pas nombreux à former des yoga-thérapeutes. A l’Institut de yoga-thérapie, la formation dure deux ans et comporte 560 heures. Elle s’adresse uniquement aux professionnels de santé ou aux professeurs de yoga.

Nous avons déposé une demande d’enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP). Nous espérons obtenir l’agrément très prochainement et ainsi une reconnaissance de la compétence en yoga-thérapie.

Podcasts : des exercices guidés par la voix

Sur cette page, le Dr Lionel Coudron, médecin et professeur de yoga-thérapie*, décrit plusieurs exercices de yoga-thérapie et vous accompagne tout au long de ceux-ci : étirements, méditations de décentration (prendre conscience de ses sensations corporelles, prendre conscience et transformer la relation à soi-même), méditations d’identification (développer l’accueil et la lumière, méditation sur le souffle et le lien, sur la bienveillance, etc.), prendre conscience de la respiration, relaxation consciente du corps…
 
Dans une ambiance apaisante, à écouter chez soi ou dans la nature, en vacances, c’est un guide précieux toujours à disposition. Cliquez sur ce lien : http://www.idyt.com/votre-pratique/

* fondateur de l’Institut de yoga-thérapie (Paris) qui forme des professeurs
Pour aller plus loin :
Institut de yoga-thérapie : http://www.idyt.com/
Exercices guidés par la voix : http://www.idyt.com/votre-pratique/
Exercices à réaliser chez vous, à votre rythme : fiche pratique
 
A LIRE
« Yoga-thérapie, Traiter les troubles respiratoires »
(ISBN 978-2-7381-5530-2)

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