Trois questions au Dr Armine Izadifar, pneumologue (Saint Denis), président de l’Association des Pneumologues libéraux d’Ile de France.
Comment définit-on aujourd’hui la sévérité de la broncho-pneumopathie obstructive ?
Dr Izadifar : Dans BPCO, le « O » désigne l’obstruction bronchique. C’est pourquoi, pendant de nombreuses années, le paramètre le plus fiable caractérisant la fonction respiratoire était le Volume Expiratoire Maximal en 1 Seconde ou VEMS ; la maladie étant alors qualifiée de plus ou moins sévère en fonction d’un score plus ou moins bas.
Puis la classification, GOLD (« Global Initiative for Chronic Obstructive Lung Disease ») a amorcé une évolution en 2011, en ajoutant deux facteurs supplémentaires au VEMS pour pondérer la sévérité de la maladie : les symptômes, au premier rang desquels l’essoufflement (dyspnée) et le nombre d’exacerbations. A noter que ces facteurs sont peu corrélés entre eux. La dyspnée par exemple, n’est pas forcément proportionnelle à la baisse du VEMS.
Ces facteurs sont intégrés au sein de l’algorithme GOLD dont la finalité est de guider le choix du traitement médicamenteux. GOLD a été réactualisé en 2017 et les propositions thérapeutiques 2017 de la Société de pneumologie de langue française (SPLF) sont construites d’ailleurs sur le même modèle. Désormais, il faut évaluer séparément la sévérité de l’obstruction bronchique (en grades 1, 2, 3 et 4 en fonction du VEMS) et l’évaluation des symptômes (en groupes A, B, C ou D en fonction de la dyspnée, du questionnaire des symptômes CAT* et des exacerbations antérieures).
Ne doit-on pas prendre en compte les maladies associées ?
Dr Izadifar : Il faut rappeler effectivement que le facteur prédictif le plus péjoratif sur l’avenir du malade BPCO est la poursuite du tabagisme. Ce tabagisme est à l’origine d’une perte en espérance de vie et en espérance de vie en bonne santé, par des maladies respiratoires, cardiovasculaires ou tumorales. Dans la cohorte PALOMB, 72% des personnes souffrent au moins d’une autre maladie en plus de la BPCO avec, parmi ces comorbidités, l’hypertension artérielle, les apnées obstructives du sommeil (SAOS), la dyslipidémie, la cardiopathie ischémique et les troubles du rythme. D’autres études montrent que ceux qui ont un VEMS supérieur à 50% ont plus de risque de décéder d’une maladie cardiovasculaire ou du cancer ; ceux dont le VEMS est inférieur à 50%, plutôt d’une complication respiratoire de leur BPCO.
On constate bien l’importance d’une prise en charge multidisciplinaire avec notamment le repérage de maladies cardiovasculaires et tumorales. Une éventuelle ostéoporose, un syndrome anxiodépressif et un SAOS, doivent aussi être explorés car plus fréquents en cas de BPCO.
Comment ajuster le traitement à la sévérité de la BPCO ?
Dr Izadifar : Ces trois critères -dyspnée-exacerbations-VEMS- conditionnent le traitement de fond à savoir un traitement bêta-2 adrénergique agoniste de longue durée d’action (bêta-2-mimétiques de longue durée d’action), un traitement anticholinergique de longue durée d’action, l’association des deux ou une association fixe comprenant des corticostéroïdes inhalés et des bêta-2-mimétiques de longue durée d’action, voire une triple association.
Les propositions françaises insistent sur deux points : initier le traitement de façon progressive et porter le choix initial en fonction du symptôme prédominant.
Hélène Joubert, journaliste