Une fois guéries de la Covid-19, certaines personnes peuvent développer, dans un second temps, une fibrose des tissus pulmonaires. Mais à ce stade des connaissances, les personnes asthmatiques ou présentant une bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) ne semblent pas particulièrement à risque.
Près de six mois après l’apparition des premiers cas de Covid-19, la question n’est plus de savoir si la fibrose pulmonaire secondaire à l’infection par le SARS-CoV-2 est une réalité. C’est un fait, indique le Pr Thierry Chinet, chef du service de pneumologie et d’oncologie thoracique (CHU Paris IdF Ouest – Hôpital Ambroise-Paré, Boulogne-Billancourt) : « Plusieurs cas ont été publiés dans la littérature et nous en avons nous-même déjà observés. Les interrogations qui demeurent en suspens aujourd’hui sont la prévalence des lésions de fibrose pulmonaire post-Covid-19, leurs évolutions (comparables ou non à celle de la fibrose pulmonaire idiopathique, par exemple) et le profil des patients susceptibles de les développer, afin de définir un protocole thérapeutique le cas échéant. »
A ce jour, les données sont extrêmement parcellaires. Néanmoins, « il semble que les patients les plus à risque de fibrose secondaire sont ceux qui ont eu une forme pulmonaire sévère de la Covid-19, estime Thierry Chinet. Chez certains patients, le scanner thoracique de suivi montre la régression des lésions aiguës (plages en verre dépoli, foyers de condensation alvéolaire…) et l’apparition progressive, sur quelques semaines, de lésions de fibrose plus ou moins étendues. » Aucune étude histologique suffisamment complète n’a été publiée permettant de comparer cette fibrose post-Covid-19 avec la fibrose pulmonaire idiopathique ou d’autres maladies pulmonaires fibrosantes.
Quant au processus fibrosant lui-même, il est bien connu et fait généralement suite à des phénomènes inflammatoires suffisamment importants et durables, ou à moins qu’il ne progresse sur un terrain génétique prédisposé, voire les deux. La Covid-19 se comporte comme une lésion aiguë du poumon entraînant une réaction inflammatoire parfois très intense et prolongée sur des semaines et même des mois. « Que des lésions inflammatoires du poumon soient à l’origine de lésions fibrotiques n’a cependant rien d’inhabituel, commente le Pr Chinet ; ceci se retrouve dans d’autres maladies inflammatoires chroniques du poumon comme la sarcoïdose et les pneumopathies d’hypersensibilité. D’ailleurs, cette fibrose post-infectieuse a déjà été décrite dans le SARS-CoV-1 en 2003 et dans le MERS-CoV (coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient). »
Le recul manque pour constater une éventuelle régression des lésions de fibrose, une stabilisation ou une aggravation. Si les zones d’ombre sont multiples, il est néanmoins absolument nécessaire de surveiller les patients ayant eu une pneumonie due à la Covid-19, au moyen d’un scanner thoracique (sans injection). « Tous les patients ayant eu un scanner thoracique anormal, révélant des anomalies parenchymateuses pulmonaires au moment de la phase aiguë de la Covid-19 doivent bénéficier d’un contrôle du nettoyage des lésions pulmonaires au moyen d’un scanner réalisé deux à trois mois après la sortie d’hospitalisation, précise le Pr Chinet, et ceci jusqu’à nettoyage complet des lésions ou du moins une stabilité confirmée par des scanners itératifs. Les patients Covid+ n’ayant pas eu de scanner thoracique à la phase aiguë mais qui, à distance, continuent à se plaindre de manifestations respiratoires inhabituelles (essoufflement, toux…) doivent impérativement se voir prescrire un scanner thoracique par leur médecin généraliste ou leur pneumologue afin de dépister d’éventuelles lésions fibrosantes. »
Par ailleurs, si la BPCO et l’asthme ne semblent pas constituer de facteurs de risque de forme sévère de la Covid-19, lorsque ces pathologies sont équilibrées grâce à leur traitement, « nous ne disposons d’aucune donnée pour affirmer que ces malades respiratoires chroniques ont un risque plus important de développer une fibrose post-pneumonie Covid-19 que les autres », estime Thierry Chinet.
Hélène Joubert, journaliste