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Échos des congrès. Souffrez-vous d’ACO ?

En direct du 22ème Congrès de Pneumologie de Langue Française (CPLF, Lyon, 26-28 janvier 2018).

Depuis quelques années, un concept ancien a été remis au goût du jour sous l’acronyme d’A.C.O., désignant le chevauchement chez une même personne d’un asthme et d’une BPCO. Que faut-il en penser ? En 2018, la littérature scientifique peine à convaincre. Pour beaucoup de pneumologues, et en particulier le Pr Nicolas Roche (service de pneumologie, hôpital Cochin, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris), on a créé de toutes pièces une nouvelle « maladie ».

Peut-être avez-vous déjà entendu parler d’ACO ou d’ACOS. Ce concept d’ACOS pour « Asthma-COPD Overlap Syndrome », qui a ensuite perdu son « s » pour devenir « ACO » (le terme de syndrome ayant été contesté), a été entériné dans les recommandations internationales conjointes du GINA sur l’asthme et de GOLD sur la BPCO en 2014.

 

Asthme, BPCO et… ACO

Selon les termes des recommandations, « l’ACOS est caractérisé par une obstruction persistante des voies aériennes ayant à la fois les caractéristiques habituellement retrouvées dans l’asthme et la BPCO ». En réaction à cette définition, le Pr Nicolas Roche est incisif : « L’ACO est seulement la représentation de la possibilité de souffrir au minimum de deux maladies bronchiques : l’asthme et la BPCO. Il est tout à fait logique d’avoir environ 10% des personnes BPCO asthmatiques et 10% des asthmatiques adultes ayant une BPCO. Faut-il pour autant lier tout cela dans un concept physiopathologique ? ».

En 2018, les études scientifiques sur l’ACO sont parcellaires. L’ACO doit encore convaincre. Les implications thérapeutiques potentielles de ce concept existent néanmoins. Les recommandations GINA-GOLD expliquent que si le tableau clinique penche plutôt du côté de la BPCO, un traitement BPCO par broncho-dilatateurs est plutôt indiqué. Inversement avec l’asthme, avec la prise préférentielle de corticoïdes inhalés. Lorsqu’on souffre des deux, alors le traitement combine les thérapeutiques de l’asthme et de BPCO.

Autre point de discorde, le flou entourant les caractéristiques de l’ACO dans les recommandations, par exemple « l’âge de début est habituellement inférieur à 40 ans », « une variabilité dans l’obstruction bronchique », « des exacerbations pouvant être plus habituelles que dans la BPCO » … La série de critères cliniques plus ou moins compatibles avec l’une ou l’autre des deux maladies n’aide pas vraiment le raisonnement diagnostic et rajoute à la confusion.

La recherche avance peu. Pour cause, dans les études disponibles, les définitions de l’ACO varient selon le contexte. Faute d’homogénéité, impossible de progresser dans la compréhension de la physiopathologie et l’épidémiologie. La prévalence même de l’ACO est extrêmement variable (1) traduisant l’imprécision du concept à ce jour et le manque de connaissances. Une revue de la littérature sur le sujet a identifié quelques points (2) : les personnes souffrant d’ACOS fument moins que les BPCO, exacerbent plus que les BPCO mais cela n’est pas systématique selon les études, pas plus que la stabilité du tableau clinique. Quant à la qualité de vie, celles des ACOS est moins bonne que celle des BPCO, laquelle est dégradée par rapport à celle des asthmes.

Difficile à ce stade de se forger une idée précise, car l’ACO englobe de nombreux phénotypes (caractères apparents d’un individu) et endotypes (mécanismes physiopathologiques) (3). Quant aux biomarqueurs (caractéristiques biologiques mesurables liées à un processus normal ou non), les ACO ou ACOS cumulent ceux des BPCO et des asthmes. Rien de plus logique. « Peut-être finirons-nous pas trouver que l’asthme, la BPCO et l’ACO sont des étapes intermédiaires au sein d’un continuum de maladies bronchiques chroniques, imagine Nicolas Roche. Et qu’on traitera non plus une maladie mais des caractéristiques majeures (exacerbations, essoufflement etc.). Chaque phénotype de la maladie bronchique chronique correspondra à un traitement ». Une médecine personnalisée qui n’est pas encore d’actualité.

L’ACO, faut-il l’oublier ? 

En 2018, un « ACO » est tout simplement un patient qui a un asthme et une BPCO c’est-à-dire des asthmatiques avec un trouble ventilatoire obstructif fixé et un tabagisme, des individus BPCO avec un diagnostic d’asthme. Tout l’enjeu réside dans le diagnostic différentiel. « Le risque d’étiqueter une personne « ACO » est d’appliquer un traitement ACO pour tous, à savoir la combinaison de corticoïdes et de bronchodilatateurs, alors même que les caractéristiques de chacun sont distinctes. Cela occulte la balance bénéfice/risque, indispensable lors de toute prescription médicale », assène le Pr Roche.

 

Hélène Joubert, journaliste

 

(1) Wurst Keele E. et al. Respir Med. January 2016 Volume 110, Pages 1–11; (2) Alshabanat A. et al. PLoS One2015 Sep 3;10(9):e0136065 ; (3) Bateman ED et al. Lancet Respir Med. 2015 Sep;3(9):719-728

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