Santé publique France et l’Institut Pasteur révèlent aujourd’hui les résultats préliminaires de deux études démontrant l’efficacité de la campagne d’immunisation préventive de l’ensemble des nourrissons français contre le virus respiratoire syncytial (1). Le VRS est une cause majeure d’hospitalisations et de décès chez les nourrissons. Durant l’hiver 2023-2024, il était recommandé d’administrer un anticorps monoclonal à action prolongée – le nirsevimab – à tous les nourrissons afin de les protéger des formes graves de l’infection et de réduire les hospitalisations associées. La France a été l’un des premiers pays à mettre en œuvre cette stratégie, et celle-ci s’avère payante.
L’efficacité du nirsevimab en vie réelle (c’est-à-dire hors essais cliniques) contre les cas graves de bronchiolite a été estimée entre 75,9 % et 80,6 % pour les nourrissons admis en réanimation, des résultats concordants notamment avec ceux d’une étude clinique internationale (2). Cette efficacité s’est aussi traduite par une nette diminution du nombre d’hospitalisations de nourrissons : en France métropolitaine, entre le 15 septembre 2023 et le 31 janvier 2024, 5800 hospitalisations pour bronchiolite ont été évitées, dont 4200 chez les enfants âgés de 0 à 2 mois entre le 15 septembre 2023 et le 4 février 2024 (3). Concrètement, cela correspond à une réduction de 23 % du nombre total d’hospitalisations pour bronchiolite à VRS après passage aux urgences (- 35% chez les 0 – 2 mois), comparativement à un scénario sans immunisation préventive.
Simon Cochrane, responsable de l’unité de modélisation mathématique des maladies infectieuses à l’Institut Pasteur à Paris, explique : “Avec une hospitalisation pour bronchiolite à VRS évitée pour 40 enfants traités, nous mettons en évidence la pertinence de l’administration du nirsevimab pour réduire les hospitalisations dues à ce virus.” Les deux études menées par Santé publique France et l’Institut Pasteur convergent vers une efficacité de l’anticorps monoclonal nirsevimab, confirmant ainsi le bien-fondé de la stratégie nationale d’immunisation de l’ensemble des nourrissons, à l’approche et pendant la saison hivernale.
Rappel du contexte
L’hiver 2022-2023 a été marqué par une épidémie de bronchiolite due au virus respiratoire syncytial (VRS) particulièrement intense, entraînant de nombreux passages aux urgences et hospitalisations de nouveau-nés. Face à cette situation, les autorités sanitaires ont lancé une campagne d’immunisation préventive des nourrissons dès le 15 septembre 2023. La France a été l’un des premiers pays à administrer le nirsevimab, un traitement à base d’anticorps monoclonal à action prolongée administré en une seule dose (Beyfortus® ; une unique injection intramusculaire), pour prévenir les infections des voies respiratoires inférieures causées par le VRS. Ca n’est pas un vaccin, il s’agit d’un anticorps monoclonal ciblant la protéine F à la surface du virus, essentielle à l’infection virale. Il confère une protection d’au moins 5 mois et est préférablement administré avant la sortie de la maternité aux nouveau-nés (4).
Un fort taux d’adhésion à l’utilisation du nirsevimab
Le fort taux d’adhésion à l’utilisation du nirsevimab qui a été constaté par les auteurs des publications françaises a probablement été influencé par les précédentes épidémies de VRS qui ont fortement mises à l’épreuve les hôpitaux français. En réponse, les professionnels de santé ont activement promu cette immunisation chez les nourrissons pour éviter la répétition de ces situations difficiles. De plus, le format en dose unique du nirsevimab a simplifié son administration et a accru l’acceptation des parents.
Jusqu’à présent, le seul traitement préventif disponible était le palivizumab, un autre anticorps monoclonal anti-VRS, mais son schéma posologique à plusieurs doses le rendait relativement contraignant. De plus, sa durée de vie relativement courte, d’un mois seulement, limitait son efficacité. Il était administré uniquement aux nourrissons les plus fragiles, en particulier aux grands prématurés, dont ceux souffrant de maladies respiratoires.
Les avantages individuels et collectifs de la prévention sont multiples :
- Il s’agit de retarder autant que possible la première infection de l’enfant, qui est presque inévitable chez tous les moins de 2 ans, mais qui est plus grave chez les moins de 3 ou 6 mois.
- De plus, il vise à réduire la gravité de la maladie chez l’enfant ou le sujet âgé ainsi que chez leur entourage, à diminuer l’impact de la maladie sur la société et enfin, à désengorger le système de soins et les services d’urgence pendant les périodes épidémiques.
Références :
1. Communiqué de presse de Santé publique France du 26/04/24 « Bronchiolite : deux études françaises démontrent l’efficacité du Beyfortus® dans la prévention des cas graves et la réduction des hospitalisations chez les nourrissons »
2. Antoine Brault et al. Estimates of effectiveness and impact of nirsevimab on hospitalisations for RSV bronchiolitis in metropolitan France, 2023-2024 : a modelling study
3. Juliette Paireau et al. Nirsevimab effectiveness against cases of respiratory syncytial virus
bronchiolitis hospitalised in pediatric intensive care units in France, September 2023 – January 2024
4. « Réponses Rapides : Nirsévimab (Beyfortus ®) dans la prévention des bronchiolites à virus respiratoire syncytial (VRS) chez les nouveau-nés et les nourrissons ». 14 septembre 2023, validé par la HAS : le collège de la médecine générale et le CNP de pédiatrie
HJ