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Arrêter le tabac avant 40 ans : une seconde chance pour une santé (quasi) intacte

Est-ce parce que l’on a écrasé sa dernière cigarette avant 40 ans que l’on remet tous les compteurs à zéro ? Pas sûr. Une nouvelle étude révèle que les fumeurs qui arrêtent avant d’atteindre la quarantaine peuvent espérer vivre aussi longtemps que ceux qui n’ont jamais allumé une cigarette. C’est une très bonne nouvelle. « Les bénéfices de l’arrêt du tabac sur la santé sont incontestables, et même chez les personnes plus âgées, précise le Dr Frédéric Le Guillou, président de Santé respiratoire France. Mais attention, car on parle ici de mortalité globale, et non d’espérance de vie en bonne santé. Or, les dégâts liés au tabagisme sont multiples et graves, notamment du point de vue des maladies respiratoires comme la BPCO dont l’évolution va grever considérablement la qualité de vie des personnes. »

On sait depuis longtemps que le fait de cesser de fumer réduit le risque de décès mais aussi les conséquences liées au tabac sur la santé. Mais on ne connaissait pas réellement l’ampleur et la rapidité avec lesquelles l’arrêt du tabac pouvait diminuer les taux de mortalité liés au tabagisme. De nouveaux résultats défraient la chronique. Ils viennent de sortir dans une prestigieuse revue scientifique et constituent un argument de poids encourageant pour être convaincu d’écraser sa dernière cigarette.

D’après l’étude conduite par les chercheurs de l’école de santé publique de l’Université de Toronto (Canada), renoncer au tabac avant la quarantaine offre la perspective de vivre aussi longtemps que si on n’a jamais fumé de toute sa vie.

Pour parvenir à ces conclusions, les chercheurs ont exploité quatre grandes cohortes nationales de patients, aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Norvège et au Canada. Ces groupes d’individus étaient composés d’adultes âgés de 20 à 79 ans, suivis entre 1974 et 2018, soit au total 1,48 million de personnes suivies pendant 15 ans en moyenne. Selon leurs conclusions, l’arrêt du tabac à tout âge était associé à une survie plus longue, en particulier si cette résolution était prise avant 40 ans.

A tous les âges et comparé au tabagisme actif, l’arrêt de moins de 3 ans aurait potentiellement évité 5 années de vie perdue et l’arrêt de 10 ans ou plus aurait évité environ 10 années de vie perdue, entraînant une survie similaire à celle des non-fumeurs, écrivent les auteurs de l’étude qui résument : « arrêter de fumer à n’importe quel âge, mais particulièrement plus jeune, est associé à une mortalité excessive globale [toutes causes de décès confondues, ndlr] plus faible et à une moindre mortalité due aux maladies vasculaires, respiratoires et néoplasiques [transformation anormale des tissus pouvant conduire à un cancer, ndlr]. Les associations bénéfiques étaient évidentes dès 3 ans après l’arrêt. »

Ne pas confondre « espérance de vie » et « espérance de vie en bonne santé » !

Plus on arrête de fumer tard, plus l’écart d’espérance de vie entre non-fumeurs et anciens fumeurs s’accroît. Mais on a toujours davantage de chances d’atteindre 80 ans si l’on a arrêté de fumer, quel que soit le moment, que si l’on avait continué. Et l’impact apparaît assez rapidement, devenant significatif à partir de trois années sans toucher à la cigarette.

Si cette moyenne dépend forcément du nombre d’années à fumer et de la quantité de cigarettes allumées quotidiennement avant 40 ans, les chercheurs ont néanmoins observé des bénéfices importants indépendamment du fait d’être un gros ou un petit fumeur.

Mais il y a un bémol d’importance : avoir fumé dans sa vie n’est pas totalement sans conséquences pour autant. En effet, les données de l’étude ne portent que sur l’espérance de vie dite globale sans préciser l’état de santé dans lequel se trouve la personne. Elle ne porte pas sur l’espérance de vie en bonne santé. Et cela change considérablement la donne.

D’ailleurs, la mortalité due à des maladies respiratoires est celle qui s’aligne le moins entre les anciens et les non-fumeurs. Cette disparité témoigne probablement des dommages irréversibles à long terme infligés aux voies respiratoires, comme indiqué dans l’étude. Autrement dit, les anciens fumeurs ont bien réduit leur risque de décès par maladie respiratoire, mais dans une moindre mesure, « probablement en raison de lésions pulmonaires résiduelles ». L’arbre respiratoire n’est mature qu’aux alentours de 20 ans et toute exposition précoce à ce que l’on appelle l’« exposome » (tabagisme, pollution, allergènes, etc.) compromet le futur « respiratoire » de l’individu, et peut déclencher des pathologies respiratoires de manière précoce sur des terrains prédisposés.

Pour arrêter de fumer, il n’est jamais trop tard

Le GUILLOU Frédéric

« Ces résultats constituent un message de santé publique très fort pour inciter à arrêter de fumer le plus tôt possible, tout en précisant qu’il n’est jamais trop tard pour prendre cette décision, ajoute le pneumologue Frédéric Le Guillou. Cela donne de l’espoir, ça motive les personnes pour entamer un sevrage tabagique et sans les culpabiliser. »    

Arrêter de fumer tôt permet de vivre plus longtemps. Quels sont les chiffres ?
🔷 Pour les personnes de 40 ans 
 
82 % des hommes de 40 ans ayant arrêté de fumer avant 40 ans seront encore en vie à 80 ans, contre 83% des hommes n’ayant jamais fumé et 59% des fumeurs.
 
87% des femmes de 40 ans ayant arrêté de fumer avant 40 ans seront encore en vie à 80 ans, contre 87% des femmes n’ayant jamais fumé et 67% des fumeuses.
 
🔷 Pour les personnes de 50 ans :
 
79 % des hommes de 50 ans ayant arrêté de fumer avant 50 ans seront encore en vie à 80 ans, contre 84% des hommes n’ayant jamais fumé et 61% des fumeurs.
 
85% des femmes de 50 ans ayant arrêté de fumer avant 50 ans seront encore en vie à 80 ans, contre 88% des femmes n’ayant jamais fumé et 69 % des fumeuses.
 
🔷 Pour les personnes de 60 ans :
 
76 % des hommes de 60 ans ayant arrêté de fumer avant 60 ans seront encore en vie à 80 ans, contre 87% des hommes n’ayant jamais fumé et 65% des fumeurs.
 
82% des femmes de 60 ans ayant arrêté de fumer avant 60 ans seront encore en vie à 80 ans, contre 90% des femmes n’ayant jamais fumé et 72 % des fumeuses.

Référence : Cho ER, Brill IK, Gram IT, Brown PE, Jha P. Smoking Cessation and Short- and Longer-Term Mortality. NEJM Evid. 2024 Feb 8:EVIDoa2300272. doi: 10.1056/EVIDoa2300272. Epub ahead of print. PMID: 38329816.

Pour en savoir plus :

LES BONNES RAISONS D’ARRÊTER DE FUMER

LE TABAC ET LES FEMMES : UNE ÉVOLUTION DRAMATIQUE DE LA CONSOMMATION

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