« Le malade BPCO, acteur de sa santé : nécessité et réalité »
« Quels sont mes droits ? Où puis-je trouver une information fiable sur ma maladie ? Que peuvent m’apporter les associations d’aide aux patients ? Au travail, à qui me confier ? Et surtout, en attendant les réponses gouvernementales concrètes au défi que représente ma maladie, comment puis-je, moi patient, contribuer activement à l’amélioration de mon état de santé ? L’Association BPCO s’est mobilisée le 7 novembre 2013 pour aider les malades à devenir des patients « éclairés », mieux armés face à la maladie. Les solutions et outils disponibles ont été placés au cœur de son colloque organisé au Palais du Luxembourg.
La BPCO : toujours plus de patients, toujours aussi peu de réponses…
En 2030 la BPCO se situera au 4e rang des causes de mortalité et au 5e rang des causes de handicap en 2020, à l’échelle mondiale. Si l’épidémiologie de maladies comme le cancer ou le diabète est aujourd’hui bien connue, la prévalence de la BPCO reste difficile à estimer. Son sous-diagnostic demeure important : il est dû notamment au manque de réalisation des Explorations Fonctionnelles respiratoires (EFR), qui sont pourtant essentielles. La BPCO est pourtant la cause directe de 16 000 décès annuels en France. Elle est de plus associée à de nombreuses comorbidités, dont elle augmente le risque de survenue.
Si le plan gouvernemental initié en 2005 a permis une prise de conscience des pouvoirs publics quant à l’enjeu majeur de santé publique qu’est la BPCO, il n’a pas bénéficié d’un budget ambitieux et les patients n’ont reçu les réponses concrètes qu’ils attendaient. Deux exemples : les EFR complètes, indispensables au diagnostic, ne sont toujours pas obligatoires et le réentraînement à l’effort, préconisé par la HAS et dont l’efficacité est unanimement reconnue, ne fait toujours pas l’objet d’un cotation d’acte spécifique par l’assurance-maladie.
Les associations d’aide aux malades prennent la main
La nécessaire transformation du malade en un patient éclairé capable d’infléchir, par son comportement, l’évolution négative de sa maladie chronique fait consensus. Mais les ambitions des associations de patients se heurtent aux lacunes gouvernementales. Dans la réalité, rien de concret n’est proposé. Cette situation est d’autant plus dommageable que l’évolution du profil des patients BPCO sur ces vingt dernières années appelle un nouveau regard sur la maladie. Ils sont toujours plus nombreux, ont rajeuni (7,5 % des adultes de plus de 40 ans sont touchés en France) et se sont féminisés. Or, cette évolution du profil du malade BPCO entraîne de nouvelles problématiques, notamment dans le milieu professionnel.
Pour donner aux patients toutes les chances de s’impliquer activement dans sa maladie, le rôle des associations de malades est crucial. Proactives, elles vont au-devant des difficultés et proposent des outils d’accompagnement. Pour Gilbert Musso, malade BPCO, elles ont « un rôle majeur à jouer, car elles ont un caractère incitatif dans le cadre d’une démarche de « prise en charge », elles peuvent s’avérer être un moteur dans la motivation d’un patient. ».
Malgré tout, la maladie et les handicaps qui en découlent restent toujours peu ou mal connus du public – et de certains professionnels de santé. C’est pourquoi l’Association BPCO, s’est encore une fois mobilisée pour répondre logiquement à l’appel des malades chroniques. Car ces dernier considèrent les associations d’aide aux malades comme les plus légitimes pour représenter et défendre leurs intérêts et ceux des usagers du système de santé (62 % des personnes souffrant d’affection chronique, selon le « Baromètre des droits des malades » publié chaque année par le Collectif Interassociatif sur la santé (CISS).
Des droits qui doivent être appréhendés
Le patient BPCO, comme le malade chronique en général, a besoin d’être armé face aux difficultés quotidiennes, que ce soit sur le plan pratique, mais aussi psychologique. Parmi les outils dont il doit disposer, figure la connaissance de ses droits en tant que malade pour pouvoir les faire respecter.
Quand il est encore en activité, le patient BPCO doit pouvoir identifier les interlocuteurs susceptibles de pouvoir l’aider sur son lieu de travail et avoir les moyens d’adapter son environnement professionnel à sa pathologie. Outre le tabac, la BPCO a aussi comme autre facteur de risque l’environnement de travail connu dans certains secteurs (minier, BTP, fonderie, sidérurgie, industrie textile ou agricole), l’environnement qui peut être à l’origine de la maladie et / ou l’aggraver.
Dany, salarié intérimaire et malade BPCO intérimaire, témoigne : « Je n’ai pas parlé à mon employeur de ma maladie, car je suis intérimaire. Dans ma région, l’emploi est assez sinistré et je ne veux pas perdre le mien. En revanche, j’en ai parlé à mon médecin généraliste, et même à Pôle Emploi. Jj’ai évoqué ma difficulté à exercer mon métier à cause de la BPCO. On m’a répondu qu’il n’y avait actuellement aucune reconnaissance de cette maladie. Non pas que je veuille une compensation financière ou une carte d’invalidité. Je souhaiterais juste avoir accès à une formation quelconque qui puisse me permettre de rebondir, de changer de statut, de métier. »
Des outils pratiques et concrets
Outre la connaissance de ses droits, le patient doit pouvoir bénéficier d’outils pratiques, offrant un accès à des informations personnalisées pour l’aider à exprimer ses préoccupations, notamment à son médecin. En la matière, l’avènement d’Internet et l’accessibilité qu’il offre aux informations santé, peut aider les médecins à mieux expliquer l’affection et ses causes, à utiliser un vocabulaire compréhensible et donc à associer le patient à la prise en charge. Toutefois, les professionnels de santé n’ont malheureusement pour autant pas toujours la possibilité de consacrer le temps nécessaire à son éducation thérapeutique.
Eduk’BPCO, un carnet de bord online personnalisable en cours de création permettra bientôt une « prise en main » de la BPCO à travers une surveillance étroite dans le temps. Les données créées, communicables au médecin, seront un outil précieux de suivi et d’analyse. Le patient aura la liberté de consigner les informations de son choix relatives à son état de santé, sa qualité de vie, son état d’essoufflement, son activité physique…
EDUK’BPCO est un outil pensé et développé par l’Association BPCO. En cours de finalisation, il sera disponible début 2014.
Le colloque de l’Association BPCO intitulé « Le malade BPCO, acteur de sa santé : une nécessité mais quelle réalité ? » a abordé l’ensemble de ces questions et tenté d’apporter un éclairage sur la situation actuelle en même temps que des réponses concrètes aux patients.
Jean-Jacques Cristofari, journaliste