Dans le domaine de l’activité physique, comme dans de nombreux autres dans la santé, « l’accompagnement motivationnel est primordial, quelle que soit l’autonomie de la personne et la sévérité de la maladie respiratoire chronique, estime le Dr Jean-Marie Grosbois, pneumologue (et fondateur de la structure FormAction Santé). En effet, il est plus complexe de « mettre en mouvement » la tête que les jambes, à la fois à court terme et surtout à long terme. » Dans le concept de « motiv’action » tel que l’entend ce spécialiste, le court terme vise principalement à rassurer la personne et à lui redonner confiance, en l’engageant concrètement dans la reprise ou la poursuite d’une activité physique, acceptée et au mieux choisie par elle, le plus souvent supervisée – du moins au départ.
Cette activité physique adaptée (APA) nécessite d’être ajustée en fonction de la sévérité de la maladie respiratoire et des comorbidités fréquemment associées, des capacités physiques de la personne, des possibilités locales et du domicile, de l’environnement socio-économique, et même des contraintes météorologiques. « Elle doit être négociée (comme disent les Anglo-Saxons « Nothing about me without me »), et adaptée en termes de fréquence, précise le Dr Grosbois, en intensité comme en durée. La fréquence se situe entre 3 à 5 fois par semaine. L’intensité doit correspondre au seuil d’essoufflement de la personne, et la durée être comprise entre 30 et 45 minutes, pouvant être fractionnée en périodes de 5 à 10 minutes pour mieux les intégrer dans la vie quotidienne. Être attentif à ne pas mettre les personnes en échec (entraînant souffrance physique et émotionnelle) est un facteur important de poursuite des APA et des activités physiques en général, et donc de motivation. Les professionnels doivent plus s’attacher à être dans la pertinence que dans la performance. »
Cet accompagnement doit être holistique en y intégrant l’éducation thérapeutique, laquelle, en transférant des compétences utiles, permet à la personne de mieux comprendre et de prendre en charge sa maladie et ses conséquences dans sa vie quotidienne, donnant du sens à cette démarche globale. « C’est un facteur de motivation intrinsèque, souligne le pneumologue. L’activité physique entre alors dans « le prendre soin », le « CARE », centré sur la personne. »
La prescription de l’activité physique s’opère selon la classification en 4 niveaux d’intervention définis par la Haute autorité de santé (HAS) :
- Pour les patients BPCO, après une évaluation médicale minimale ou une consultation médicale d’activité physique, on orientera ceux atteints de BPCO sévère ou très sévère ou avec une insuffisance respiratoire chronique, et/ou avec des comorbidités, vers une structure de réadaptation respiratoire (niveau 1). L’activité physique sera alors poursuivie à long terme, selon les besoins et le choix du patient, dans le cadre d’un programme d’activité physique adaptée (APA) supervisé par un professionnel de l’APA (niveau 2), ou de sport-santé en clubs supervisé par un éducateur sportif formé (niveau 3), ou d’activité physique et sportive de loisir en autonomie (niveau 4).
- Pour leur part, les patients atteints de BPCO moins sévère seront orientés vers un programme d’APA supervisé par un professionnel de l’APA (niveau 2), ou de sport-santé en clubs supervisé par un éducateur sportif formé (niveau 3), ou d’activité physique et sportive de loisir en autonomie (niveau 4).
Cette prescription médicale ciblée est un facteur de motivation initiale plébiscitée par les patients.
Pour une communication motivationnelle
Selon le Dr Grosbois, « l’accompagnement motivationnel devrait être réalisé idéalement par l’ensemble des intervenants, fondé sur un entretien motivationnel initial, mais poursuivi tout au long du parcours de santé par une « communication motivationnelle » de tous et de tous les instants. Cette approche permet de créer et de renforcer la confiance et l’alliance thérapeutique, nécessaires à la pérennisation des changements de comportement de santé plus favorables – dont l’activité physique. L’entourage et les aidants ont également un rôle majeur à jouer dans cette remise en mouvement motivationnelle et physique des patients atteints de maladies respiratoires chroniques. La « dynamique de groupe » est certes motivante et facteur de lien social, mais nous avons pu constater, après un programme de Réadaptation respiratoire à domicile, que la « dynamique de couple et de l’entourage » l’était tout autant, permettant également la reprise d’activité physique de l’aidant. »
A long terme, des conseils doivent être prodigués pour tous les patients, et par tous les intervenants du parcours de soin, afin de réduire le temps total de sédentarité à moins de 7 heures par jour (en rompant les temps prolongés assis, en se levant et en bougeant au moins une minute toutes les heures). Retrouver et augmenter les activités physiques régulières de la vie quotidienne est primordial. La poursuite des activités physiques, dont celles dites « adaptées », pourra s’appuyer sur les programmes précités, en privilégiant l’autonomisation. A cette intention, « les différentes applications proposées pour « motiver » aux activités physiques et sportives sont utiles, reconnaît le Dr Jean-Marie Grosbois, à la condition d’être choisies et adaptées à la personne malade. Elles doivent être considérées comme des outils, et non comme une fin en soi. Par ailleurs, des programmes de télé-réadaptation se développent en France pour répondre aux besoins de certains patients à court et long terme. »
De manière générale, les activités physiques ne seront réalisées, et poursuivies, que si elles sont diversifiées, ludiques, choisies (avec une notion de plaisir) et qu’elles servent à réaliser les projets personnels du patient (grâce à des résultats positifs, visibles en vie réelle). « La communication motivationnelle, en proposant et en valorisant des succès qualifiés de « SMART » (Spécifiques, Mesurables, Accessibles, Réalisables, dans un Temps donné), participe à soutenir la motivation intrinsèque des personnes souffrant de maladie respiratoire chronique ainsi que leur entourage », résume le Dr Grosbois.
Utiliser la communication motivationnelle pour promouvoir l’activité physique. Avec le Pr Kim LAVOIE, Co-directrice du centre de médecine comportementale de Montréal (CMCM)
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