Les dernières avancées en matière d’activité physique adaptée pour les personnes en situation de handicap sont le résultat d’un effort conjoint de la part de différents ministères, acté lors du dernier Comité interministériel du handicap. En quoi consistent-elles ?
L’activité physique adaptée occupe une place importante, transversale et impliquant divers secteurs et ministères. Au ministère des Sports, l’accent est mis bien entendu sur le sport, notamment avec les Jeux olympiques et paralympiques 2024. Du côté du ministère de la Santé, c’est l’aspect santé qui est regardé, et l’importance de l’activité physique sur ce point est démontrée et reconnue, allant bien au-delà du sport. Or, chez les personnes en situation de handicap, les pratiques physiques et sportives restent souvent en deçà de la moyenne. Chez elles comme en population générale, il est nécessaire de déconstruire les idées fausses sur les activités physiques et sportives, qui font à tort renoncer à leur pratique.
Car l’activité physique adaptée peut jouer un rôle majeur pour les personnes en situation de handicap, comme pour tout le monde : elle contribue au développement de la confiance et de l’estime de soi et des compétences sociales. Les clubs sportifs qui se forment aujourd’hui pour devenir « inclusifs » – dont 4 000 sont attendus en 2024 – constituent à ce titre une dynamique à suivre. Les clubs sont ainsi incités à adapter leurs infrastructures et leurs activités pour permettre la pratique du sport par les personnes en situation de handicap. Cette démarche vise à permettre à tous, quelles que soient leurs capacités, de participer pleinement à des activités physiques, et par conséquent de favoriser l’épanouissement individuel.
Conférence nationale du handicap 2023 |
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L’accessibilité des infrastructures sportives sera accélérée par un soutien renforcé de l’Agence nationale du sport, et 3 000 clubs sportifs inclusifs supplémentaires se déploieront sur le territoire pour la pratique de tous (4 000 clubs inclusifs sont visés d’ici à la fin 2024). Les encadrants seront ainsi formés pour accueillir tous les publics. De plus, pour encourager la pratique sportive des plus jeunes, les sportifs de moins de 30 ans bénéficiant de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) ou de l’allocation adulte handicapé (AAH) seront soutenus financièrement grâce au Pass’Sport. Parallèlement à la désignation de référents sport dans chaque établissement social et médico-social, un appui financier des Agences régionales de santé (ARS) viendra soutenir le déploiement des « 30 minutes d’activité physique quotidienne » auprès des enfants accompagnés dans les structures. |
Quelles sont les priorités du dernier CIH spécifiquement axées sur l’activité physique et sportive ?
Le dernier CIH a programmé les actions prévues lors de la Conférence nationale du handicap autour de 4 axes : placer la pratique sportive au cœur du projet de vie de la personne ; diversifier la pratique dans tous les lieux de vie ; améliorer la visibilité du parasport (ou handisport) ; et enfin lutter contre toutes les formes de violences dans le sport. La première brique est l’accessibilité des infrastructures sportives à tous, en garantissant que les lieux de pratique sportive soient conformes aux normes d’accessibilité. C’est aussi simplifier l’accès à l’information des personnes en situation de handicap sur les équipements sportifs accessibles proches de chez elles. Le président de la République s’était engagé à rendre accessibles les prothèses pour la pratique sportive, en particulier les lames de course. Dès 2024, elles seront prises en charge par la prestation de compensation du handicap. Le développement de la pratique parasportive sera soutenu par un appui financier aux fédérations sportives, et certaines subventions seront conditionnées à l’organisation d’une démonstration ou d’une initiation parasportive durant tous les grands évènements sportifs internationaux. En parallèle, pour diversifier la pratique sportive dans tous les lieux de vie, un fonds de soutien aux projets sportifs des Établissements et Services Médico-Sociaux (ESMS) sera déployé, permettant 30 minutes d’activité physique et sportive par jour minimum afin de n’écarter aucun enfant de cette priorité. Enfin, pour lutter contre les violences dans le sport, il est prévu de promouvoir et de diffuser l’outil Réglo’Sport, un dispositif de signalement des violences sexistes et sexuelles – un véritable fléau contre lequel il nous faut lutter efficacement dans tous les domaines.
Quel sera l’héritage des Jeux olympiques et paralympiques 2024 ?
Regardez tous ces athlètes qui n’ont pas hésité, qui ont foncé ! Mais attention à l’image du « super-héros », du dépassement de soi, etc., dans laquelle ne se reconnaîtront pas toutes les personnes qui se sentent justement bien éloignées de la condition physique et mentale des « super-héros » que nous applaudirons aux JO 2024. D’où la distinction à faire entre « l’activité physique et sportive », et « la performance ». S’il ne faut pas exagérer avec cette idée de super-héros, il faut aussi cependant valoriser les performances, car elles peuvent susciter des vocations chez des personnes à qui on pourrait dire : « Pour toi, ce n’est pas possible ». Ce qui a été initié par le ministère des Sports, en interministériel, c’est cette intelligence de valoriser, ce dépassement des limites, qui contribue à l’idée que tout est possible. Que vous vouliez faire du sport occasionnellement ou de haut niveau, avec un handicap ou non, vous y avez droit et nous nous engageons à rendre cela réalisable.
Vous insistez souvent sur le fait que c’est l’envie qui doit guider la pratique sportive. Est-ce aisé aujourd’hui dans le cadre du handicap ?
En effet, la clé réside dans l’envie de la personne. Si elle désire pratiquer le tir à l’arc, il est essentiel de trouver l’outil technique approprié lui permettant de le faire de manière adaptée. Cela représente un véritable enjeu en matière d’innovation technologique. L’évolution des fauteuils roulants adaptés pour diverses disciplines, comme le tennis, le basket ou la course, en est un exemple concret. Il est primordial de ne pas se limiter, de dépasser les barrières et de favoriser l’accès à la pratique.
Comment l’association Santé respiratoire France peut-elle faire avancer le déploiement de l’activité physique adaptée ?
La grande force de l’association est l’implication des pairs, c’est-à-dire l’expertise des personnes handicapées elles-mêmes, en tant que pairs ou patients partenaires, qui aident à étendre le champ des possibles, dans la vie quotidienne comme dans la pratique d’une activité physique adaptée. Ce ne sont pas les discours qui vont convaincre les personnes en situation de handicap de faire du sport ou de l’activité physique, mais c’est cette expertise directe. C’est même la clé de la réussite de nos politiques publiques.
Un autre point est que l’association peut favoriser l’innovation technologique et sociale dans le domaine de l’activité physique adaptée, dans une optique de co-construction avec les patients. Enfin, elle participe à briser le tabou que nous avons tous dans la tête concernant les maladies respiratoires, c’est-à-dire la soi-disant incompatibilité entre le manque de souffle et la pratique de l’activité physique ; le cas d’école est l’asthme, lequel était, il y a une vingtaine d’années, une contre-indication à la pratique sportive.
Nous avons changé la vision erronée que nous avions des possibilités des personnes en situation de handicap. Il faut désormais changer de braquet au niveau des actions. L’association dispose d’ambassadeurs en la matière, à vous de les valoriser.
16es Rencontres Santé respiratoire France : le livre des interventions